Un historique de l'alpinisme depuis 1945 dans les montagnes de l'Himalaya et du monde

Un historique soulignant les principaux événements se rapportant à l'alpinisme - sans prétendre bien sûr à l'exhaustivité - est proposé en plusieurs dossiers du CFD :

- Un historique de l'alpinisme de 1492 à 1914
- Un historique de l'alpinisme de 1919 à 1939
- Un historique de l'alpinisme de 1945 à nos jours dans les montagnes d'Europe
- Un historique de l'alpinisme de 1945 à nos jours dans les montagnes de l'Himalaya et du monde.

L'alpinisme de 1945 à nos jours dans les montagnes de l'Himalaya et du monde

Préambule

Concernant les initiatives vers les montagnes lointaines, les deux dossiers précédents ont abordé les sujets suivants :

Avant 1914, dossier du CFD : Un historique de l'alpinisme de 1492 à 1914
- Premiers regards hors d'Europe
- Déjà l'Himalaya
- Chomolangma-Everest

Avant 1940, dossier du CFD : Un historique de l'alpinisme de 1919 à 1939
- Hors des massifs européens
- En Afrique et en Amérique
- Les montagnes de l'Himalaya et du Karakoram
- Chomolangma-Everest
- L'exclusivité britannique par le Tibet

Sommaire :

Les montagnes de l'Himalaya et du Karakoram
1950 - Annapurna premier 8000
D'autres initiatives
1953 - Chomolangma-Everest
L'utilisation de l'oxygène
L'assistance des porteurs
Le succès des Britanniques
Entre 1950 et 1960 - L'âge d'or
Dès 1954 - Vers d'autres montagnes
L'ascensionnisme féminin vers les montagnes lointaines avant 1970
Chomolangma-Everest - Objectif majeur 1960-1963
1970 - L'apogée d'une méthode
Chomolangma-Everest - Objectif majeur 1975-1983
1975 - Vers d'autres montagnes
1979 - Les expéditions pyramidales en question
L'ascensionnisme féminin vers les montagnes lointaines après 1970
1980 - Les temps modernes
Chomolangma-Everest - Objectif majeur 1984 à nos jours
Vers les autres sommets de 1982 à nos jours
La recherche de l'économie de moyen
Ascensions hivernales
Le ski en très haute altitude
Les quatorze huit mille
Les parois rocheuses des tours de Trango
À propos de l'aide à la performance
L'industrie l'Everest en 2020
Les grandes lignes de l'activité 

 Pour éviter l'ambigüité entre Guide de montagne professionnel et guide-itinéraires manuscrit, une majuscule est ajoutée au premier nommé.

LES MONTAGNES DE L'HIMALAYA ET DU KARAKORAM

  • Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, les regards se tournèrent de nouveau vers les plus hautes montagnes du globe.

Les principales nations, possédant un alpinisme dynamique et actif, ont mis en place des structures chargées de mener l'exploration des montagnes lointaines, notamment des plus hauts sommets de l'Himalaya et du Karakoram… Elles se présentent peu à peu, notamment les Austro-allemands, les Britanniques, les Français, les Italiens et les Suisses.

Redisons encore une fois que l'organisation de pareilles expéditions nécessitait - à ce moment-là - des compétences techniques, financières et diplomatiques très éloignées du savoir-faire des alpinistes. Seul un comité d'organisation pouvait conduire un pareil projet.

Les Français se préparent.

Ils n'ont été présents qu'une seule fois dans les montagnes lointaines les plus hautes du globe en 1936, sur plus de cent expéditions déjà organisées, et les 8000 ont été tentés trente fois, sans aucun résultat (voir le dossier du CFD : Un historique des expéditions lointaines institutionnelles françaises).

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1950 - ANNAPURNA PREMIER 8000

En 1949, le Népal - jusque-là fermé aux étrangers - ouvre ses frontières, les européens se précipitent. En premier lieu les Britanniques qui ont une longue expérience et une organisation solide, mais ont un seul vrai objectif, l'Everest, qui se refuse à eux depuis trente ans.

En 1949, en France, à l'initiative de Lucien Devies, président du Club Alpin et de la Fédération Française de la Montagne (FFM), un comité d'organisation, créé au sein de la FFM, prendra le nom de « Comité de l'Himalaya ». Il succède au « Comité français de l'Himalaya », structure indépendante organisatrice de l'expédition de 1936 vers l'Hidden Peak qui accepta de passer la main.

Le cadre juridique de l'expédition est reconduit sur les mêmes bases que celui des années trente « préservant les produits de l'expédition, film, livre, articles, photographie et conférence, qui permettront d'organiser une seconde expédition et ainsi de suite ».

Cette commission aura pour mission d'organiser, de préparer, de contrôler, de gérer les conséquences de la future expédition et des suivantes, « d'approuver une politique d'ensemble menée en faveur des expéditions hors d'Europe, dans le souci de l'unité d'action des alpinistes français ».

L'expédition est dirigée vers l'Annapurna et le Dhaulagiri, deux montagnes jamais approchées par les himalayistes. C'est finalement l'Annapurna qui sera choisi.

En 1950, un assaut rapide, léger et déterminé est décidé vers l'Annapurna 8091m.
Souvenons-nous que le groupe opère sans l'aide de l'oxygène respiratoire et va devoir forcer la chance, avant l'arrivée de la mousson.

Ce sera le formidable succès du 3 juin 1950.

Les deux du sommet - Maurice Herzog et Louis Lachenal - auront à subir de douloureuses amputations durant la marche du retour, sous les pluies de la mousson.

C'est le retour tragique et glorieux...

Pour bien situer l'exploit, l'historien Christian Greiling rappellera plus tard que l'Annapurna restera le seul sommet de tous les géants de plus 8000m, à avoir été gravi sans reconnaissance, ni tentative préalable.

Les Français réalisaient la première ascension d'un sommet dépassant l'altitude mythique de 8000m, l'engouement du grand public sera considérable et les confusions multiples (voir dossier du CFD : Un historique des expéditions lointaines françaises institutionnelles).

À propos de l'Annapurna

À la fin du XXe siècle et à l'approche du cinquantenaire de l'ascension de l'Annapurna, certains hors contexte et utilisant des informations partielles et des « on-dit » ont voulu exploiter l'événement historique à des fins d'édition. En développant la thèse empoisonnée de la suspicion.

Pourtant, la description précise donnée par les deux du sommet : la grande falaise terminale et le couloir permettant l'accès au sommet, que personne sauf eux, ne pouvait connaître, constituait une information essentielle, irréfutable et définitive (voir le dossier du CFD : Un historique des expéditions lointaines françaises institutionnelles / Année 2000 / Annapurna 1950).

Un remarquable travail de Jean-Jacques Prieur, publié dans la revue du Groupe de Haute Montagne, permet de s'informer et de comprendre…
- Annapurna, une affaire de cordée ou de photos ? Cimes 2014.
- Annapurna, la conjuration du centenaire. Cimes 2015.

En mai 2022, parution du livre Annapurna 1950 chez l'éditeur Héliopoles, de Christian Greiling. L'ouvrage pertinent et indiscutable replace l'événement correctement.

Ce travail d'un historien - extérieur à nos cercles habituels - revient sur les égarements de quelques auteurs sans scrupules en mal d'édition des trente dernières années.

L'auteur démonte les nombreux arguments avancés par les polémistes. Et il souligne que le livre, tant décrié d'Herzog, s'appuyait en fait sur les écrits de plusieurs membres de l'expédition, et déjà publiés dans les journaux de l'époque.

Yves Ballu mis en cause dans l'ouvrage pour certains de ses écrits, apporte une réponse, qui lui appartient, dans son blog accessible sur Internet.

 

D'AUTRES INITIATIVES

En France, l'animation produite par le succès sur les pentes de l'Annapurna va suggérer en 1951 en France des initiatives vers les montagnes lointaines.

<  En 1951, une expédition lyonnaise, avec une proposition extrêmement audacieuse et novatrice, se présente pour réaliser la traversée reliant les deux sommets de la Nanda Devi 7816 et 7434m, distants de deux kilomètres. Le 29 juin 1951, Roger Duplat et Gilbert Vignes partent d'un camp vers 7200m pour cet objectif très risqué, et qui sera une traversée sans retour…

<  Presque au même moment, une équipe parisienne, renforcée par Lionel Terray, dirigée par René Ferlet, se rend en Patagonie pour tenter le Fitz-roy, 3334m. De cette aventure, deux personnalités s'extraient nettement : Lionel Terray et Guido Magnone. Le 2 février 1952, les deux sont les premiers à atteindre le sommet de cette montagne. 

< En 1953, troisième tentative nord-américaine sur le K2 jusqu'à 7850m, les alpinistes engagés restent bloqués dix jours dans le mauvais temps et perdront un des leurs, dans la retraite.

1953 - CHOMOLANGMA-EVEREST, 8850m

L'accès par le Népal

Les Britanniques ne lâchent pas l'Everest.

Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, ils tentent sans succès d'obtenir une nouvelle autorisation pour le versant tibétain du Chomolangma- Everest, mais le Tibet ferme ses portes aux étrangers et restera interdit jusqu'en 1979.

L'effort diplomatique britannique se porte vers Katmandou, capitale du Népal, afin de tenter la grande montagne par le sud. À cette époque, le Népal commence à s'ouvrir aux visiteurs.

Ils obtiennent une autorisation pour une reconnaissance en 1951, pour envisager l'ascension par la seule faiblesse de la montagne par le Népal. Le glacier de Khumbu et la cascade de glace donnant accès à la grande Combe Ouest, au pied de la face sud de la montagne.

En 1951, la mission d'exploration, dirigée par Eric Shipton, remonte la vallée du Khumbu, plusieurs reconnaissances sont entreprises. Les explorateurs forcent la cascade de glace, et prennent pied dans la Combe Ouest…

Ainsi se terminaient trente-cinq années de tentatives, aux suivants allaient revenir la gloire du succès. De la suite, seule l'histoire se souviendra…

Les Suisses lorgnent aussi vers l'Everest, et les Français viennent de réussir le premier 8000, et avec les retombées financières qui en résultent, ils peuvent, eux aussi, prétendre tenter la grande montagne. 

Après une conversation avec les Anglais, Lucien Devies, président du Comité de l'Himalaya, indique :

« Il fut admis qu'il était normal que les Anglais organisent les premiers une expédition d'assaut à l'Everest, les Anglais acceptant que les Français tentent à leur tour leur chance en cas d'échec ».

L'utilisation de l'oxygène

De l'avis des experts du moment, les plus les grands 8000, l'Everest, le K2, le Kangchenjunga et le Makalu ne pourraient être gravis qu'avec l'aide de l'oxygène respiratoire. Les pays les plus avancés dans l'exploration des plus hautes montagnes vont chercher à améliorer les dispositifs mis au point et utilisés par les Britanniques en 1922, 1924 et 38.

En France, dès 1952, Lucien Devies et le Comité de l'Himalaya, en vue du projet vers l'Everest, avaient décidé d'un programme de recherches et d'expérimentation pour l'utilisation de l'oxygène. Investigation effectuée à partir de la limite d'acclimatement connue et conduite par Raymond Latarjet et Jacques Oudot avant sa disparition.

Partant de l'expérience des Britanniques, Jean Cousy faisait réaliser des appareils à oxygène mieux adaptés aux himalayistes, avec des bouteilles légères de haute technologie (lire les articles : L'oxygène et L'acclimatement dans la revue La Montagne & Alpinisme d'octobre 1955). 

Avec l'expérience acquise, après acclimatation, il n'y a pas de difficulté jusqu'à 7500m et plus haut, pour de cours séjours. Déjà l'Annapurna en 1950 avait été gravi sans l'aide de l'oxygène, comme les diverses incursions des Britanniques durant leurs tentatives sur l'Everest, dès 1922.

Pour les itinéraires d'envergure, nécessitant de rester plusieurs jours au-dessus de 8000m, l'aide de l'O2 au-dessus de 7500m, permettra ces longues périodes dans cette zone d'oxygène raréfié.

L'ASSISTANCE DES PORTEURS

 Les porteurs des collines

La tsampa comme seul aliment, quarante kilos de charge (et souvent plus) sur le dos, durant de longues heures de marche sur des pistes difficiles et escarpées, il faut aux porteurs des collines une bonne dose d'optimisme et de bonne humeur pour rendre la route supportable. Dans les massifs de l'Himalaya et du Karakoram en dehors des routes carrossables, le transit commercial et économique s'effectue à dos d'hommes et de femmes, dans les zones reculées de certaines contrées, les itinéraires de transit de ces vallées éloignées ne permettant pas toujours le passage des bêtes de somme.

Une petite gamelle pour préparer le repas, un petit sac contenant plusieurs jours de nourriture, de la farine de millet et une couverture pour le repos de la nuit pour tout bagage ; tels sont ces hommes et ces femmes de labeur qui assurent la vie économique des vallées perdues.

Ce sont eux qui vont permettre aux expéditions de s'avancer vers leurs camps de base, dès les premières tentatives britanniques de 1922.

Les porteurs de haute altitude, les Sherpas                                    

La spécialisation de porteurs d'altitude est presque toujours liée aux hommes d'une même peuplade, ils ont su acquérir au fil des expéditions une telle réputation de compétence et de courage dans cette difficile et ingrate discipline que le nom de leur peuplade arrive à se confondre avec le nom du métier.

Aujourd'hui, la corporation de porteurs de haute altitude est organisée et protégée par les règles de la législation népalaise. Durant l'approche, ils n'assurent aucun portage, ils s'occupent de la bonne avancée de la caravane vers le camp de base. En altitude, ils porteront vingt kilogrammes jusqu'à six mille cinq cents mètres. Au-dessus, les charges ne dépasseront pas quinze kilos, ce qui est, pour les connaisseurs, une charge déjà redoutable à cette altitude.

On lira plus loin le paragraphe consacré : L'industrie de l'Everest en 2020.

LA TENTATIVE DES SUISSES VERS L'EVEREST

Les Britanniques ne sont plus les maîtres du jeu.

À ce moment-là, ils ignoraient encore qu'ils avaient été devancés par les Suisses.

Ils ne peuvent qu'assister de loin aux efforts de l'expédition suisse, qui ouvre la voie du Col sud et de l'arête sud-est.

Mais le 28 mai 1952, Raymond Lambert et Norgay Tensing Sherpa échouent vers 8540m. Dès l'automne, ils se présentent de nouveau, mais un peu trop tardivement, et c'est un nouvel échec.

Ils montrent pourtant aux suivants le bon itinéraire et les deux saisons favorables, les périodes de prémousson en mai et de postmousson en octobre...

 

 

LE SUCCÈS DES BRITANNIQUES

En 1953, cette expédition était certainement la dernière chance pour les Britanniques de gravir les premiers le Chomolangma-Everest 8850m. Ils n'allaient pas laisser passer leur chance, en ne lésinant pas sur les moyens, car derrière, les Français piaffaient.

Le Comité britannique de l'Everest désigne un chef ayant « la capacité et l'expérience d'un officier d'état-major », le colonel John Hunt, un alpiniste expérimenté.

On fait taire les critiques et on décide de l'utilisation très discutée de l'oxygène, à ce moment-là « la fin justifie les moyens ».
L'itinéraire suivra celui reconnu par les Suisses.

Le 12 avril, l'expédition gagne le camp de base à 5400m. Le 21 mai, le Col sud est atteint.
Le 26 mai, appuyé par Hunt et le Sherpa Da Namgyal, la cordée Bourdillon et Evans parvient à l'antécime sud de l'Everest, 8754m. Les deux hommes en forme sont désignés pour le sommet : Edmund Hillary et Norgay Tensing.
Le 28 mai, la cordée d'appui - Lowe, Gregory et le Sherpa Ang Nima - accompagne la cordée d'assaut ; ils établissent le camp IX à 8500m et laissent Hillary et Tensing à leur destin.

Et le 29 mai 1953, 11h30, le « Toit du monde », Chomolangma-Everest, 8850m, est gravi par Edmund Hillary (1919-2008) et Norgay Tensing Sherpa (1914-1986). Les deux du sommet entrent dans la légende.

La stratégie et la tactique d'Hunt et du Comité d'organisation britannique avaient triomphé.

Ce succès rehaussait le prestige britannique dans le monde entier, au moment des fêtes du couronnement de la reine Elisabeth II d'Angleterre.

Constatons qu'Hunt, en bon Britannique, n'avait pas hésité à choisir et à imposer pour l'assaut un Néo-Zélandais et un Sherpa népalais ; les Britanniques devront encore patienter vingt ans pour être effectivement présents sur le Chomolangma.

Les Suisses ne sont pas oubliés ; le 17 juin, un télégramme parvenait à la « Fondation suisse pour l'Everest », il était signé par Hunt : « À vous autres, une bonne moitié de la gloire ».

Un symbole et un mythe s'effaçaient

Pour les Français et le Comité de l'Himalaya, il faut revoir les ambitions.

« Un symbole et un mythe s'effaçaient. C'est le cœur serré, mais avec une sincérité complète que nous applaudîmes au succès exceptionnel de nos amis britanniques, l'espoir d'apporter une contribution française à la conquête du culmen du monde s'était évanoui. Mais il n'était pas question de se décourager » écrit Lucien Devies. Et le Makalu figure en bonne place. 

ENTRE 1950 et 1960 - L'ÂGE D'OR

L'âge d'or des premières ascensions des grands sommets de l'Himalaya et du Karakoram ne va durer que quelques années ; les cinq plus élevés (les grands 8000) sont atteints de 1953 à 1956, les autres sont tous gravis de 1950 à 1960.

<  En 1950, c'est l'Annapurna, 8091m, par les Français.
<  En 1953, le Chomolangma - Everest, 8850m, par les Britanniques.
<  En 1953, le Nanga-Parbat, 8125m est réussi par une expédition austro-allemande, et par l'exploit solitaire d'Hermann Buhl.
<  En 1954, le K2, 8611m est le succès d'une expédition italienne, pour le second plus haut sommet, avec son lot de polémiques.
<  En 1954, le Cho Oyu, 8201m, par une cordée autrichienne.
<  En 1955, c'est le Makalu, 8463m, par les Français.
<  En 1955, les Britanniques peuvent escalader le Kangchenjunga, 8586m.
<  En 1956, le Lhotse, 8516m, par les Suisses.
<  En 1956, c'est le Manaslu, 8163m, par les Japonais.
<  En 1956, le Gasherbrum 2, 8035m, par les Autrichiens.
<  En 1957, c'est le Broad Peak, 8047m, par une expédition légère autrichienne.
<  En 1958, le Gasherbrum 1, 8068m est visité par les Nord-Américains.
<  En 1960, le Dhaulagiri, 8167m, par les Suisses.

Inaccessible pour des raisons politiques, le Shishapangma, 8013m, devra patienter un peu plus, pour voir des hommes l'approcher et le gravir en 1964.

L'ouvrage La Chronique himalayenne de Marcel Kurz par la Fondation suisse pour l'exploration alpine, de 1959, apporte d'utiles précisions sur la période 1940-1955.

Une montagne appelée K2

<  En 1954, l'expédition italienne, chef Ardito Desio, avec 12 ascensionnistes, gagne Skardu en avion, l'approche commence le 30 avril, le camp de base est atteint le 30 mai, le camp VIII est installé le 28 juillet sur l'éperon des Abruzzes. Sont désignés pour la tentative vers le sommet : Achille Compagnoni et Lino Lacedelli.

Walter Bonatti qui à l'époque n'a que 24 ans est très présent et voudrait bien avoir sa chance. C'est sur lui que va reposer l'édifice patiemment mis en place. Pendant que les deux chargés de la tentative finale montent vers le camp IX, probablement vers 8150m, Bonatti et le porteur d'altitude Hunza Mahdi effectuent le transport des appareils à oxygène respiratoire pour l'ascension du lendemain. Malgré un effort exceptionnel, les deux hommes ne parviennent pas à rejoindre le camp IX prévu, mais qui ne semble pas être à l'endroit convenu, ce sera l'objet de polémiques à n'en plus finir. Bonatti et Mahdi sont contraints à un bivouac difficile dans un trou de neige vers à 8100m…

Les chances de sommet de Bonatti se trouvaient anéanties, ce qui provoquera chez lui une grande amertume, une incompréhension et des accusations.

<  Le sommet du K2 est atteint par Achille Compagnoni et Lino Lacedelli, le 31 juillet 1954, avec les appareils à oxygène respiratoire récupérés au préalable.

Avec l'aide de médias sans scrupules, le retour glorieux va se transformer en une suite de controverses. Concernant la formation de l'équipe, le financement de l'opération qui n'avait pas été trouvé, et surtout celles provoquées par les incompréhensions entre les deux du sommet et Bonatti, celles-ci vont perdurer 40 ans.

<  En dehors des polémiques, l'entreprise constitua un événement de première importance dans l'histoire de l'alpinisme, la présence des hommes sur le second sommet du monde par son altitude, 8611 mètres, le 31 juillet 1954.

 Lire aussi les articles consacrés dans le n°3/1994 de la revue LM&A.

1954 et 1955 - LE MAKALU, 8463m

En 1955, les Français, qui voyaient leur chance anéantie d'être les premiers sur le Chomolangma-Everest, s'intéressent au Makalu, 8463m, pas encore exploré.

Après une reconnaissance poussée en 1954, l'expédition du printemps 1955 en bénéficiant des meilleures conditions possibles au niveau des hommes, des moyens, du temps et de l'état du terrain, « va avoir la rigueur d'une démonstration » (voir le dossier du CFD : Un historique des expéditions lointaines françaises institutionnelles).

Le Makalu, 8463m et au loin le Kangchenjunga Le Makalu, 8463m et au loin le Kangchenjunga

 

DÈS 1954 - VERS D'AUTRES MONTAGNES

1954 - Le coup de tonnerre de l'Aconcagua

En 1954, pendant la préparation d'une opération sur un grand 8000, par le Comité de l'Himalaya, la nouvelle de l'ascension de l'Aconcagua, 6959m par sa face sud, a l'effet d'un coup de tonnerre.

C'est une expédition « de copains aussi fauchés qu'enthousiastes, sans billet de retour, avec un matériel minable et hétéroclite », dirigée par René Ferlet, qui réalise l'exploit de forcer un itinéraire dans la formidable face sud de la plus haute montagne du continent américain.

Sommet le 25 février 1954 pour Lucien Bérardini, Adrien Dagory, Edmond Denis, Pierre Lesueur, Robert Paragot et Guy Poulet. Malheureusement, la plupart des équipiers auront à subir de douloureuses amputations.

L'exploit sera reconnu comme il se devait, et restera un des hauts faits de l'ascensionnisme français.

Pour la première fois, une grande paroi située en haute altitude est gravie (voir le dossier du CFD : Un historique des expéditions lointaines françaises institutionnelles).

Le Denali-McKinley, 6194m

Le Denali-McKinley, 6194m est le plus haut sommet d'Amérique du nord, exploré la première fois en 1913, c'est une montagne opposant des accès engagés. Trois itinéraires sont à signaler parmi d'autres.

<  En 1951, « West Buttress route », l'arête ouest, est gravie le 10 juillet, par Bradford Washburn, James Gale et William Hackett ; le 13 juillet, par John Ambler, Henry Buchtel ; et le lendemain, par Melvin Griffiths et Jerry More.
<  En 1954, « South Buttress route ». Sommet le 15 mai, par George Argus, Elton Thaler, Leslie Viereck et Norton Wood (chute mortelle de Thaler durant la descente).
<  En 1961, « Cassin Ridge », l'imposant éperon central du versant sud, est parcouru par une expédition italienne, dirigée par Riccardo Cassin. Sommet le 19 juillet pour les six membres de l'expédition, dont Cassin. L'éperon deviendra une référence.
Le versant nord (Wikersham Wall) interrogeait les ascensionnistes. En 1963, une équipe nord-américaine inaugure Pioneer Ridge à gauche du versant. En 1964, un team canadien parcourt la dorsale de droite, avec six camps, et un groupe nord-américain force un itinéraire direct par l'éperon central, avec neuf camps.

1956 - La Tour de Mustagh, 7273m

En 1956, une expédition britannique réussit la Tour de Mustagh, 7273m située dans le Karakoram, cinq jours plus tard, c'est une petite équipe française qui gravit ce sommet, par un itinéraire différent.

Ces deux succès, mobilisant des effectifs très limités, passeront complètement inaperçus, malgré leurs conceptions novatrices. Car beaucoup conservent les yeux braqués au-dessus de 8000m.

1957-1962 - LE JANNU, 7710m

En 1957, le Comité de l'Himalaya « décida de faire tenter » le Jannu, peut-on écrire, en reprenant une expression de Lionel Terray. Après une reconnaissance en 1957, l'expédition est prévue pour le printemps 1959, mais va échouer vers 7400m.
En 1962, c'est un succès collectif complet (voir le dossier du CFD : Un historique des expéditions lointaines françaises institutionnelles).

Il avait fallu trois opérations, dont deux d'envergure pour obtenir le succès, d'où le titre de la relation : « Bataille pour le Jannu » ; mais c'était « ce qui avait été accompli de plus difficile et de plus audacieux dans l'Himalaya ».

1962 - Le versant Diamir du Nanga Parbat, 8125m

En 1962, une expédition allemande, avec Toni Kinshofer, Sigi Löw (qui se tue durant la descente) et Anderl Mannhardt, réussit l'ascension du Nanga Parbat par le versant Diamir, c'est la première fois qu'un itinéraire difficile est tracé sur un sommet majeur en Himalaya.

1964 - Le Shishapangma, 8013m

En 1964, le dernier sommet dépassant 8000m situé en territoire Tibétain est atteint par une expédition sino-tibétaine, le Shishapangma, 8013m.

L'ascensionnisme féminin vers les montagnes lointaines avant 1970

Des initiatives féminines vers les montagnes lointaines sont suggérées dès les années d'après-guerre, mais la complexité de l'organisation, à cette époque, restera un frein à leurs enthousiasmes.

Ce sont surtout les actions de Claude Kogan qui peuvent être soulignées (voir le dossier du CFD : L'alpinisme au féminin).

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CHOMOLANGMA-EVEREST - OBJECTIF MAJEUR 1960-1963

1960 - Les Chinois par l'arête nord

En 1960, les Chinois gravissent la montagne depuis le Col nord des explorations britanniques de l'entre-deux-guerres, cette première par le versant Tibet deviendra la voie classique depuis le nord.
L'expédition chinoise emprunte l'arête nord-est, qui s'est refusée si longtemps aux Britanniques.

Depuis le Col nord, 7066m escalade par le rameau secondaire nord donnant accès à l'arête nord-est, au niveau de l'épaule nord-est, 8380m.
Dans la partie supérieure, Chu Yin-hua, Kombu (Gongpa) et Wang Fu-chou parviennent à forcer un passage dans le Second Ressaut, ce qui leur ouvre l'accès au sommet le 24 mai.

Dans un contexte de guerre froide, les photographies publiées, qui ne proviennent pas du pinacle, animeront de belles polémiques, et certains mettront un moment en doute la réalité de l'exploit.

Depuis, plusieurs mises au point et discussions, avec l'un des protagonistes, ont apaisé le débat. Une preuve formelle a également été apportée, elle montre que les clichés photographiques provenaient de l'arête nord-est, au-dessus du Second Ressaut, vers 8700m.

On sait aujourd'hui que depuis ce point, plus aucun obstacle ne vient gêner la montée.

1963 - Les Américains par l'épaule ouest et le versant nord

En 1963, c'est une performance de grande valeur qui est réalisée par une expédition nord-américaine, dirigée par Norman Dyhrenfurth.

Depuis la Combe Ouest, par les bandes neigeuses du versant sud-ouest, l'accès à l'épaule Ouest, 7200m est reconnu. Au-dessus, les difficultés de l'arête ouest sont évitées, par une intrusion en versant nord. Un couloir caractéristique, qui deviendra le Couloir Hornbein, permet de rejoindre les pentes sommitales.

Sommet le 22 mai pour Thomas Hornbein et William Unsoeld, après trois camps placés depuis la Combe Ouest, un dernier vers 8300m. Pendant cette ouverture, d'autres cordées - dont quatre grimpeurs qui gagneront la cime - équipent l'accès par le Col Sud et l'arête sud-est. 

Ce qui va permettre à la paire Hornbein-Unsoeld de redescendre, en traversant pour une première fois la montagne.

1970 - L'APOGÉE D'UNE MÉTHODE

En 1970, pratiquement au même moment, la Commission fédérale française et les instances britanniques jugent le moment opportun pour tenter une évolution décisive, vers des itinéraires d'intérêt sportif, sur un grand huit mille.

Organiser une opération, qui par son ampleur ne peut qu'appartenir à la technique des expéditions très structurées, telle est la seule issue légitime pour les deux organisations.

1970 - Le versant sud de l'Annapurna, 8091m

<  Au printemps 1970, une expédition britannique explore le versant sud de l'Annapurna, 8091m. Le sommet est atteint le 27 mai 1970, par Dougal Haston et Don Whillans.

C'est le début des grands itinéraires sportifs, sur les principaux sommets himalayens.

D'autres initiatives

<  La même année, le Lhotse-Shar, 8400m, satellite du Lhotse, est gravi par une expédition autrichienne.
<  En 1970 encore, une expédition austro-allemande inaugure un itinéraire, depuis le versant Rupal du Nanga Parbat, 8125m. Sommet par les frères Messner, ils traversent la cime en descendant par le versant Diamir, mais Günther disparaît dans une avalanche, seul Reinhold pourra revenir, ascension le jour suivant par Felix Kuen et Peter Scholz, qui retournent par le versant Rupal.
En 1970, une équipe japonaise réalise la première de l'arête sud-est du Makalu, 8463m après deux mois à batailler sur cette longue crête, en réalisant la seconde ascension de la montagne, après les Français de 1955.

1971 - Le Pilier ouest du Makalu, 8463m

Pour les Français, le choix se porte sur le fabuleux pilier ouest du Makalu.

Au printemps 1971, après un difficile siège de plusieurs semaines, le sommet est atteint le 23 mai 1971, par Bernard Mellet et Yannick Seigneur (voir le dossier du CFD : Un historique des expéditions lointaines françaises institutionnelles). 

Ce succès, sur le pilier ouest du Makalu, marque l'apogée d'une méthode, adoptée à ce moment-là, pour gravir les hautes montagnes, avec un comité - autorité morale - qui fixe un objectif, gère administrativement l'opération, « s'occupe des papiers », des finances, de la « diplomatie », désigne le chef d'expédition, qui sera son représentant et son seul interlocuteur, et choisit aussi l'ensemble du groupe.

CHOMOLANGMA-EVEREST - OBJECTIF MAJEUR 1975-1983

1975 - Le versant sud-ouest

Tracer un itinéraire dans le versant sud-ouest du Chomolangma-Everest a été l'objectif majeur des grosses expéditions très structurées des années 1970.

L'obstacle principal était constitué par le Ressaut Rocheux Supérieur, que les premières expéditions tentèrent toutes de forcer par la droite, en vain. Les premiers furent les Japonais en 1969 et 1970, ils échouèrent vers 8000m. Puis un team international en 1971, des équipes allemande, puis britannique en 1972, et encore japonaise en 1973, elles abandonneront vers 8350m.

La solution est apportée par une expédition britannique, conduite par Chris Bonington. Elle parvient à trouver un cheminement possible, par la gauche du Ressaut Rocheux Supérieur : un véritable « trou de souris » qui donne accès aux pentes supérieures. Ensuite une traversée vers la droite permettra de gagner d'abord le sommet Sud. Quatre camps ont été placés, le dernier vers 8200m, au-dessus du Ressaut Rocheux Supérieur.

Le 24 septembre 1975, le sommet sera pour Dougal Haston et Doug Scott, et deux jours plus tard pour Peter Boardman, Pertemba Sherpa et Mick Burke qui disparaît probablement pendant la descente.

C'est un paroxysme pour les expéditions lourdement structurées.

1975 - Premières féminines

Au printemps 1975, première féminine du toit du monde, par la voie népalaise, le 16 mai, pour la Japonaise Junko Tabei, accompagnée d'Ang Tsering Sherpa.

Quelques jours plus tard, par la voie d'accès du versant tibétain, sommet le 27 mai, par une expédition chinoise, pour neuf Sino-Tibétains - surtout Tibétains - dont Mme Phan Thong, seconde femme sur Chomolangma-Everest.

En 1978, Wanda Rutkiewicz sera la troisième femme en si haut lieu.

1978 - Sans oxygène

Au printemps 1978, première ascension sans oxygène le 8 mai, par Peter Habeler et Reinhold Messner.

La présence française

En automne 1978, c'est une équipe réunie par Pierre Mazeaud qui se présente pour l'Everest, l'objectif est la voie classique par le Népal.

« La fascination de l'Everest faisait son œuvre et il fallait un jour une réponse française » notera Lucien Devies.

Sommet pour Jean Afanassieff, Nicolas Jaeger et Pierre Mazeaud, accompagnés de leur camarade autrichien Kurt Diemberger.

L'expédition apportait une modeste, mais réelle contribution française, sur cette montagne boudée par le Comité de l'Himalaya, qui n'avait pas eu sa chance en 1954.

Le Tibet ouvert

Le 26 octobre 1978, l'agence de presse Chine Nouvelle annonce : « Feu vert aux étrangers pour huit sommets chinois », dont le Chomolangma-Everest.

En 1979, les autorités chinoises publient une première réglementation.

1979 - L'arête ouest

Au printemps 1979, première ascension intégrale de l'arête ouest du Chomolangma-Everest, par une expédition yougoslave. Sommet le 13 mai, pour Jernej Zaplotnik et Andrej Stremfelj, et le lendemain pour Stane Belak, Stipe Bozik et Ang Phu Sherpa, qui fera une chute mortelle durant la descente, par la voie américaine de 1963.

1980 - Première hivernale

En 1980, le Népal autorise une saison hivernale. Première pour une expédition polonaise, dirigée par Andrzej Zawada par la voie népalaise du Chomolangma-Everest. Le 17 février, sommet pour Leszek Cichy et Krzysztof Wielicki, l'escalade était menée à bien malgré des conditions climatiques difficiles : froid intense, vent et neige instable sur l'arête sud-est. Une très grande réalisation !

Le Tibet accessible

Au printemps 1980, la première initiative étrangère, sur l'arête nord du Chomolangma-Everest, sera japonaise : sommet le 3 mai, pour Yasuoh Kato. La réouverture du Tibet aux expéditions confèrera bientôt à l'arête nord le statut de « voie normale » du versant tibétain. Elle entraîne aussi une intense activité sur les immenses versants qui dominent les glaciers de Rongbuk et de Kangshung, ainsi que sur la démesurée arête nord-est.

1980 - Couloir des Japonais, pilier sud et couloir Norton

Une expédition japonaise inaugure un premier itinéraire d'envergure en versant nord, dans la partie droite de la face. Depuis le glacier central de Rongbuk, cheminement original par un couloir bien marqué, puis remontée des bandes de neige médianes (White Limbo), pour rejoindre le Couloir Hornbein. Sommet du Chomolangma-Everest le 10 mai pour Takashi Ozaki et Tsuneoh Shigehiro.

Le pilier sud

En mai 1980, parcours par le pilier sud pour les Polonais Andrzej Czok et Jerzy Kukuczka.

1980 - Un exploit extraordinaire 

En été 1980, la face nord du Chomolangma-Everest est gravie en solitaire et sans oxygène, par le Couloir Norton. C'est Reinhold Messner qui accomplit cet exploit extraordinaire ! Le sommet est atteint le 20 août, après trois bivouacs. Il faudra encore deux jours pour revenir.

Cette ascension du toit du monde par Messner, sans utiliser l'oxygène respiratoire, est totalement convaincante, à l'inverse de celle de 1978, où la cordée évoluait sur l'itinéraire classique parcourant le versant népalais.

1982 - Les Soviétiques

Au printemps 1982, le Pilier central sud-ouest est un relief caractéristique de la grande montagne, un peu à gauche dans la dépression centrale de la face sud-ouest, où se déroule la voie britannique de 1975. Il aboutit à la crête ouest au niveau de l'épaule du Ressaut Supérieur, 8296m.

Les grimpeurs soviétiques se préparaient, depuis quelque temps déjà, pour ce premier rendez-vous avec la grande montagne (le Comité de l'Himalaya français avait apporté sa collaboration en mettant à disposition son manuel de préparation), et la démonstration de leur savoir-faire est impeccable.

Depuis la Combe Ouest, quatre camps d'altitude sont placés, deux sur le pilier, les deux derniers à 8250 et 8500m. Le 4 mai, sommet d'abord pour Vladimir Balyberdin et Éduard Myslovsky, un peu plus tard pour sept autres équipiers.

1983 - Le versant Kangshung

En automne 1983, ascension par le Kangshung. Ce gigantesque versant est sera la dernière face explorée du Chomolangma-Everest. Parcours par une équipe américaine. L'itinéraire rejoint l'arête sud-est vers 8475m.

Sommet le 8 octobre pour Carlos Buhler, Kim Momb et Lou Reichardt, et le lendemain pour trois autres compagnons. 

1975 - VERS D'AUTRES MONTAGNES

<  Au printemps 1975, une expédition lyonnaise inaugure un bel itinéraire original sur le Gasherbrum 2 avec ses 8035m, sommet le 18 juin pour Marc Batard et Yannick Seigneur, avec malheureusement la disparition le lendemain de Bernard Villaret.
<  Au printemps 1975, ascension en technique alpine du Gasherbrum 1, 8068m pour Peter Habeler et Reinhold Messner.
<  En 1976, ascension par le versant Rupal du Nanga Parbat, 8125m par un groupe de quatre Autrichiens : Siegfried Gimpel, Robert Schauer, Hanns Schell et Hilmar Sturm. La voie Schell deviendra la voie classique par le Rupal.
<  En 1976 encore, le Changabang, 6863m est atteint par la face ouest, pour Peter Boardman et Joe Tasker.
<  En 1977, seconde du K2, 8611m par une expédition japonaise, en reprenant l'itinéraire de l'éperon des Abruzzes de 1954.
<  En 1977, première via l'éperon sud-ouest du Baintha Brakk, 7285m dans le Karakoram, pour Doug Scott et Chris Bonington. Retour terrible de Doug Scott - qui s'est brisé les deux jambes pendant la descente -, il ne pourra revenir qu'avec l'aide de ses équipiers et une volonté peu commune. 
<  En 1978, solitaire du Nanga Parbat par Reinhold Messner.

1979 - LES EXPÉDITIONS PYRAMIDALES EN QUESTION

Du côté français, à la fin des années soixante dix, et après bien des hésitations, le Comité de l'Himalaya se décide pour un objectif novateur sur le K2, la seconde montagne du monde avec ses 8611m.
L'arête sud-ouest, haute et très redressée, est l'ambition de l'expédition française.

C'est une opération mammouth qui est montée, semblable par son gigantisme au modèle des Britanniques de 1975, mis en place dans le versant sud-ouest de l'Everest.

Le dernier ressaut, donnant accès aux pentes terminales de la montagne, ne pourra être forcé, et il faudra déplorer la mort de deux assistants porteurs durant le déroulement de l'opération.

Cet échec et ses conséquences financières, en utilisant des moyens, une tactique et une éthique déjà discutés, vont provoquer la remise en question de la méthode française d'organisation et de gestion des expéditions, la responsabilité d'un comité parisien, des équipiers pas assez concernés, des moyens disproportionnés.

Désormais le Comité de l'Himalaya ne sera plus organisateur d'expédition, c'est-à-dire juge et partie, il aura dorénavant pour mission de seulement reconnaître et de favoriser les initiatives des individus ou des groupes issus de la vie associative (voir le dossier du CFD : Un historique des expéditions lointaines françaises institutionnelles).

C'est la fin d'une méthode et d'un style.

Une méthode économe en vies humaines

Ces systèmes très organisés d'expéditions qui, au début des années 1980, vont apparaître si lourds, si encombrants et si dépassés, avaient pourtant permis la plupart des succès des années 1950 et 1960 sur les plus grandes montagnes.

C'était la réponse de ces hommes-là et à ce moment-là. 


Ces systèmes très organisés étaient aussi, ne l'oublions pas, une méthode économe en vies humaines, ce que les partisans de l'économie de moyens sauront beaucoup moins bien faire.

L'ascensionnisme féminin vers les montagnes lointaines après 1970

À ce moment-là, les femmes alpinistes vont s'attaquer aux itinéraires prestigieux des plus hautes montagnes de la terre. 

Avec les accès grandement facilités, la fréquentation de la très haute altitude sera remarquable, mais l'engagement nécessaire sera coûteux en vies humaines. 

Les performances de quatre personnalités peuvent être soulignées : Wanda Rutkiewicz, Inès Papert, Gerlinde Kaltenbrunner et Nives Meroi (voir le dossier de CFD : L'alpinisme au féminin).

1980 - LES TEMPS MODERNES

La bonne méthode et le bon style

<  En 1978 déjà, une petite équipe de 4 grimpeurs britanniques Rab Carrington, Brian Hall, Roger Baxter-Jones et Alan Rouse, réalise l'ascension du Jannu, 7710m en technique alpine, par la voie française de 1962.
<  En 1980, reprise de la voie du pilier ouest du Makalu de 1971 en bon style (voir ci-après).
<  En 1982, par le versant sud-ouest du Shishapangma (Xixabangma), 8013m, c'est un itinéraire nouveau sur un grand 8000 qui est inauguré en style alpin (voir ci-après).

Les progrès réalisés par le matériel et l'amélioration des conditions physiques des grimpeurs, désormais sportifs de haut niveau, vont permettre d'avoir recours à ces assauts rapides, légers et déterminés - suggérés antérieurement -, même pour certains itinéraires difficiles en très haute altitude.

C'est un bouleversement dans les pratiques qui s'annonce. La technique alpine va devenir la référence, pour envisager, à quelques exceptions près, une escalade sur les plus hautes montagnes du monde.

À ce moment-là, la bonne méthode et le bon style devenaient « de faire plus avec moins » selon les mots d'Alex MacIntyre, l'un de ces précurseurs des années mil neuf cent quatre-vingts.

La technique alpine

La technique alpine consiste à envisager et à réussir une ascension en complète autonomie depuis un camp de base, situé au pied d'un itinéraire, à l'image de ce qui se pratique dans les Alpes et les montagnes d'Europe, et en opposition aux expéditions classiques, qui installent un système pyramidal de camps d'altitude aux différents étages de leur exploration.

Cette nouvelle ambition ne se trouvait que dans la solidarité, l'engagement et la motivation de la cordée ou du petit groupe autonome et responsable. Cette ambition imposait que les acteurs soient, comme dans nos Alpes, les décideurs de leur projet commun et des moyens à mettre en œuvre.

Devenaient obsolètes : la mise en place de l'énorme dispositif des expéditions structurées, l'oxygène, l'occupation systématique et pyramidale des itinéraires par des camps fixes, l'équipement de l'itinéraire par des cordes fixes, et aussi les interventions extérieures porteuses d'un projet qui n'appartenait pas, dans son choix, à ceux qui réaliseront l'action.

Concernant l'utilisation de l'oxygène

Déjà les initiatives de 1978 par Habeler et Messner et surtout de 1980 par Messner seul, avaient montré que d'atteindre le plus haut sommet du monde était réalisable, sans assistance respiratoire.

Mais l'oxygène restera tout de même nécessaire pour surmonter certains itinéraires difficiles, sur les plus hauts sommets, lorsque des séjours prolongés à de très hautes altitudes se révéleront obligatoires.

Quelques réalisations marquant l'entrée dans ces temps modernes

1980 - Le pilier ouest du Makalu, 8463m

<  En 1980, une petite équipe nord-américaine de quatre reprend, sans l'aide de l'oxygène et des assistants sherpas, la voie du pilier ouest du Makalu de l'expédition française de 1971. Sommet le 15 mai pour John Roskelley.

1982 - La face sud-ouest du Shishapangma, 8013m en technique alpine

<  Au printemps 1982, du 25 au 28 mai, la cordée Alex MacIntyre, Roger Baxter-Jones, Doug Scott réalise une voie nouvelle sur un 8000, en technique alpine, et en quatre jours, sur la face sud-ouest du Shishapangma, 8013m, haute de 2500 mètres, par le grand couloir central. MacIntyre indiquera :

« La face était l'ambition ; le style est l'obsession ».

Cette première sur le versant sud-ouest du Shishapangma, en technique alpine, est un tournant dans l'histoire de l'himalayisme, pour la première fois un itinéraire est inauguré en style alpin sur un sommet de 8000m.

1986 - Le pilier sud-ouest du K2, 8611m

<  En 1986, une expédition polonaise escalade le pilier sud-ouest du K2, dans une conception moderne et engagée, avec équipement jusqu'à 7700m. Les Polonais Przemyslaw Piasecki et Wojciech Wroz et le Slovaque Peter Bozik, en utilisant deux camps, vers 6900 et 7400m, et deux bivouacs vers 8000 et 8400m, forcent l'itinéraire. Sommet le 3 août, avec malheureusement la chute mortelle de Wojciech Wroz, durant la descente.

C'est une performance remarquable, qui ruinait définitivement une méthode et un savoir-faire mis en place depuis soixante ans, et qui n'avaient pas su assez rapidement évoluer, et se remettre en question.

CHOMOLANGMA-EVEREST - OBJECTIF MAJEUR DEPUIS 1984

On constatera la forte activité de l'ascensionnisme russe et kazakh, sur les itinéraires les plus audacieux, et les obstacles les plus conséquents.

Bien sûr, des parois exceptionnelles vont encore nécessiter le recours aux cordes fixes et aux camps d'altitude, ce qui sera critiqué par les tenants d'une éthique rigoureuse.

Mais l'Everest, à cause de son altitude, demandera encore longtemps le recours à des moyens particuliers, pour l'exploration des itinéraires d'envergure, sauf pour des séjours très courts et rapides en très haute altitude.

Il faudra attendre le parcours en technique alpine de ces colossaux itinéraires, réalisés avec l'aide des cordes fixes, l'oxygène et des camps d'altitude, pour que la démonstration rejoigne la critique.

1984 - Le Grand couloir nord 

<  L'accès direct au Couloir Norton, depuis le glacier central de Rongbuk, par le Grand couloir central médian nord restait à explorer. C'est une expédition australienne qui mène à bien cet exploit, avec quatre camps d'altitude. Le 3 octobre, le sommet sera pour Greg Mortimer et Tim Mc Cartney-Snape. Performance majeure, c'est la première fois qu'une voie nouvelle est tracée sur le toit du monde, sans l'aide de l'oxygène. Le chef d'expédition A. Henderson est monté jusqu'à 8800 mètres, ratant le bonheur pour quelque 50 misérables mètres.
<  En 1986, les Suisses Erhard Loretan et Jean Troillet, d'abord par une variante d'attaque directe, et ensuite par la voie japonaise de 1980, gravissent la face nord en quarante-cinq heures aller-retour, le périple étant mené principalement de nuit. Les deux n'avaient emporté ni tente, ni corde, ni baudrier et évidemment ni oxygène.
<  En 1986, l'ascension par l'épaule ouest et le couloir Horbein du versant nord reste un challenge souvent essayé, rarement achevé. C'est une équipe canadienne qui se porte à la cime en partant depuis le glacier de Rongbuk, avec un accès désormais commode par le Tibet. Sommet pour D. Congdon et Mme Sharon Wood, depuis un dernier camp vers 8170m.

1988 - Le versant du Kangshung

<  Au printemps 1988, sur versant tibétain, le pilier gauche du versant Kangshung donne accès au col Sud. Il est inauguré par une petite entité comprenant les Américains Robert Anderson et Ed Webster, le Canadien Paul Teare et le Britannique Stephen Venables.

Depuis le glacier de Kangshung, l'itinéraire rejoint directement le Col Sud, pour suivre ensuite la voie normale népalaise. Stephen Venables atteint seul le sommet le 12 mai, sans l'aide de l'oxygène, ses deux compagnons s'étant arrêtés à l'antécime Sud.

1991 - Le versant nord et le Couloir Norton

<  Depuis le glacier de Rongbuk et les pentes donnant accès au Col Nord, une traversée ascendante rejoignant le Couloir Norton vers 7300m, est inaugurée par une expédition italienne. Le 17 mai, sommet pour Battista Bonali et le Tchécoslovaque Leopold Sulovsky, depuis un dernier camp vers 8100m.

1995 - La monstrueuse arête nord-est

<  La monstrueuse arête nord-est a d'abord été tentée en 1982, par les Britanniques Peter Boardman et Joe Tasker, sans l'aide de l'oxygène et sans porteur d'altitude. Ils sont observés une dernière fois le 17 mai vers 8300m.
<  Deux autres tentatives britanniques ont lieu en 1985 et 1988. Durant la seconde, Russell Brice (NZ) et Harry Taylor parviennent à l'épaule nord-est, 8380m le 6 août1988. Ils font ainsi la jonction avec la voie classique tibétaine, par laquelle ils redescendront, sans pouvoir lancer un assaut décisif vers la cime.
<  L'intégrale de l'arête nord-est sera réussie par une équipe japonaise. Sommet le 11 mai 1995 pour Kiyoshi Furano, Shigeki Imoto, Lhakpa Nuru Sherpa, Dawa Tshering Sherpa, Nima Dorje Sherpa et Pasang Kami Sherpa.

Seule et en autonomie

<  En 1995, Alison Hargreaves réussit le sommet seule et en autonomie, sans assistance et sans utiliser l'oxygène respiratoire, un exploit réalisé par la voie classique tibétaine. Trois mois plus tard, elle est emportée par une avalanche durant une tentative sur le K2.

1996 - La jonction des deux arêtes nord

<  En 1996, autre itinéraire sur le versant tibétain, par une expédition russe, la voie remonte la très raide facette nord séparant l'arête nord-est de son rameau nord, au-dessus du glacier oriental de Rongbuk.

Le périple est original jusqu'à la jonction des deux arêtes, au niveau de l'épaule nord-est 8380m. Sommet le 20 mai pour Valeri Kokhanov, Pietr Kouznetsov et Grigori Semikolenov.

2000 - Descente à skis

<  Une descente intégrale à skis du Toit du monde, par la voie classique népalaise du Col Sud, est réalisée par le Slovène Davo Karnicar. Le versant tibétain avait été partiellement skié depuis le sommet en 1996, par Kammerlander. Une performance de premier ordre, ambition de plusieurs protagonistes. C'est ce que l'on ne pourra pas améliorer pour ce qui concerne l'altitude skiée…

2001 - Descente en surf des neiges

<  Au printemps 2001, exploit de Marco Siffredi, qui réussit le 23 mai la descente de l'Everest, par le Couloir Norton du versant nord et tibétain, sur un surf des neiges, en 2h30, pour déchausser à son camp de base avancé vers 6400m. Montée au sommet depuis un camp 4 vers 8300m, avec l'aide de l'oxygène respiratoire.

2004 - La face nord directe, un objectif colossal

<  Au printemps 2004, parcours de la face nord directe, entre les couloirs Norton et Hornbein, par une expédition russe.

Une vaste entreprise - qui se déroulera du 25 février au 9 juin - proportionnée au colossal objectif proposé. L'expédition comprend treize grimpeurs, chef Viktor Kozlov. Cordes fixes et assistance de l'oxygène. Un camp 2, vers 7200m, est installé le 27 avril.
À la fin du mois d'avril - après déjà un mois de péripéties - l'altitude de 7500m est atteinte le 30 avril.
Ce qu'il faut bien appeler un combat va durer encore un nouveau mois.
Les difficultés rencontrées imposeront un dernier point d'appui, un camp 5 vers 8600m.

Sommet le 30 mai, pour Pavel Shabalin, Ilyas Tukhvatullin et Andrey Mariev, le 31 mai pour Peter Kuznetsov, Gleb Sokolov et Eugeny Vinogradsky, et le 1er juin pour Viktor Bobok et Viktor Volodin.

C'est un succès d'une grande qualité - utilisant la technique himalayenne - qui complète l'exploration de versant nord de la montagne. C'est le plus difficile itinéraire réussi sur le plus haut sommet du monde.

Au regard de cet imposant versant nord direct et de la méthode utilisée, on peut dire que la fin justifiait leurs moyens.

2009 - Le versant sud-ouest

<  Au printemps 2009, une expédition coréenne inaugure un itinéraire sur la gauche du versant sud-ouest de la grande montagne. Cordes fixes, oxygène et quatre camps dans la face vers 7350, 7800, 8200 et 8350m, l'itinéraire rejoint dans la partie supérieure l'itinéraire russe de 1982. En place dès le 19 mars, et sommet le 20 mai pour Young-Seok Park, Jae-Chang Jin, Dong-Min Shin et Ki-Seok Kang. 

VERS LES AUTRES SOMMETS de 1982 à nos jours

  • On constatera, comme pour l'Everest, l'importante activité de l'ascensionnisme russe et kazakh dans les itinéraires les plus audacieux, et les obstacles les plus conséquents.

Certaines parois exceptionnelles vont encore nécessiter le recours aux cordes fixes et camps d'altitude. Mais à part quelques itinéraires d'envergure, le style alpin va peu à peu prendre le pas sur les techniques traditionnelles, et va désormais être la bonne façon de faire.

1982 - La face sud-ouest du Shishapangma, 8013m en technique alpine

<  Au printemps 1982, et déjà évoqué, pour la première fois un itinéraire est inauguré en style alpin, sur un grand 8000 (voir ci-avant : § 1980 - Les temps modernes).

1982 - Le pilier sud-ouest du Bhagirathi III, 6454m

< En 1982, inauguration du pilier sud-ouest du Bhagirathi III situé dans les montagnes du Garhwal, par les Écossais Bob Barton et Allen Fyffe.
C'est le premier itinéraire difficile sur ce sommet qui retiendra bientôt l'attention des autres grimpeurs. Le sommet avait été visité pour la première fois en 1933, par une expédition britannique.

1983 - La face sud-ouest du Denali-McKinley, 6194m

<  En 1983, Bryan Becker et Rolf Graage réalisent en 17 jours Denali Diamond, une voie sur la face sud-ouest du Denali-McKinley, en Alaska. L'itinéraire rejoint dans le haut l'arête Cassin. Seuls neuf jours d'activité avaient été possibles, à cause des conditions météorologiques, et les vivres avaient manqué durant la dernière semaine.
<  La voie ne sera reprise qu'en 2002 par les Britanniques Kenton Cool et Ian Parnell en cinq jours.

1984 - La face sud de l'Annapurna en technique alpine

<  En 1984, une voie en face sud de l'Annapurna, vers le sommet médian, est visitée par la simple cordée catalane Nil Bohigas et Enric Lucas en cinq jours.

Une performance de premier ordre réussie en technique alpine, et qui passera un peu inaperçue.

1984 - Le pilier ouest du Bhagirathi III, 6454m

<  En 1984, le pilier Ouest du Bhagirathi III est exploré par des Espagnols Juan Aldeguer, Segio Martinez, José Moreno et Juan Tomas. Escalade en technique capsule en 12 jours, sommet le 24 mai. « Estrella imposible » sur ce pilier bordant la face ouest surplombante est une performance de premier ordre.
Reprise en style alpin en 10 jours par les Canadiens David Lane et Scott Flavelle en octobre de la même année et par une cordée française l'année suivante en 10 jours également.

1984 - Annapurna, 8091m - arête est et traversée

<  En automne 1984, une cordée suisse parcourt la longue arête est de l'Annapurna. Après préparation, ascension par Norbert Joos et Erhard Loretan du 21 au 26 octobre, en descendant par la voie française, et en réalisant ainsi la première traversée de la montagne.

1985 - Nanga Parbat, 8125m - pilier est-sud-est

<  En 1985, le formidable pilier est-sud-est du Nanga Parbat est gravi par une expédition polonaise. Sommet pour Jerzy Kukuczka et trois compagnons. En 1982, Ueli Buhler membre d'une expédition Herligkoffer avait atteint le sommet sud, sans pouvoir rejoindre le sommet principal.

1986 - Le pilier sud-ouest du K2, 8611m

<   En 1986, une expédition polonaise réussit l'ascension du pilier sud-ouest du K2, dans une conception moderne et engagée (voir ci-avant : §1980 - Les temps modernes).

1986 - L'année terrible

En 1986, c'est une année terrible pour les ascensionnistes en action sur le K2 ; le bilan sera de 13 morts, la descente de ce sommet est souvent un piège mortel pour les cordées en difficulté.
Les expéditions légères paient le prix élevé de leur faible autonomie.

Parmi eux, nos camarades Liliane et Maurice Barrard, qui sont de très actifs himalayens.
Maurice Barrard était aussi le président du Comité de l'Himalaya, et depuis longtemps très engagé au Club Alpin Français, notamment dans l'enseignement alpin.

1987 - La face nord-ouest du Spantik, 7027 m

<  En été 1987, la cordée de Mick Fowler et Victor Saunders inaugure un itinéraire sur la face nord-ouest du Spantik, dans le Karakoram, sommet le 11 août.

1988 - Une traversée du Makalu, 8463m

<  En 1988, les 26 et 27 avril, aidé par quelques cordes fixes en place, Marc Batard escalade le pilier ouest du Makalu en 18 heures et retourne par l'itinéraire du versant nord, achevant une traversée de la montagne...

Une performance époustouflante.

1988 - Le pilier sud-ouest du Dhaulagiri, 8167m

<  En 1988, une cordée tchécoslovaque parcourt en style alpin le pilier sud-ouest du Dhaulagiri, en 9 jours et 4 pour redescendre.

1989 - Le versant sud du Makalu, 8463m

<  En 1989, du 3 au 6 octobre, Pierre Béghin réussit l'exploit exceptionnel de gravir, seul au-dessus de 7200m, le versant sud du Makalu, en revenant par l'itinéraire du versant nord.

1989 - La traversée du Kangchenjunga

<  En 1989, une expédition soviétique, après l'ouverture de deux itinéraires originaux en avril, réalise la traversée du Kangchenjunga, depuis le Yalungkang, 8505m jusqu'au sommet Sud, 8474m. En passant par le sommet Central, 8476m et le sommet principal, 8586m, pendant qu'une seconde équipe effectuait le parcours inverse au début mai, montrant un savoir-faire exceptionnel.

1990 - La face sud du Lhotse, 8516m

En 1990, la face sud du Lhotse est un objectif majeur de l'Himalaya et une aventure extraordinaire, une paroi mythique qui semblait impossible.

<  Première sérieuse incursion en mai 1981, par une cordée slovène avec Andrej Stremfelj, Pavel Podogornik et Nejc Zaplotnik, qui vinrent échouer si près du Graal vers 8250m.
<  Une expédition russe, de dix-sept grimpeurs, installe un siège en règle. Cordes fixes jusqu'à 8000m et ascension par la grande côte caractéristique, bordant le couloir central du versant sud.
Sommet le 16 octobre 1990 pour Sergey Bershov et Gennadiy Karataev.

Une grande performance individuelle et collective.

1990 -  La gestion des déchets des expéditions

En France, ce n'est qu'en 1938 qu'un début de prise en compte de l'environnement proche par les usagers et les associations sera perceptible. La montagne, la campagne, les forêts françaises étaient, à cette époque, souvent souillées, par les déchets et détritus de toutes sortes, abandonnés par les campeurs, randonneurs, promeneurs et alpinistes.
Dans les années soixante-dix, dans les Alpes et les Pyrénées, des mesures avaient été prises pour le traitement des détritus et des eaux usées avec les consignes précises : trier, composter et redescendre dans les vallées.

En Himalaya, en 1990, sur la route de l'Everest principalement, la situation deviendra rapidement cruciale, avec des monticules de détritus à gérer. Les autorités des pays d'accueil prendront des dispositions, en faisant financer le traitement des déchets, par les expéditions.

Il fallait une réaction forte des ascensionnistes eux-mêmes :

« La plupart d'entre nous se sont rendus coupables, une fois ou l'autre, malgré nos précautions et notre bonne volonté, de laisser sur place une corde fixe, un camp d'altitude ou de négliger de surveiller l'équipe de cuisine au moment de quitter le camp de base. Compte tenu de la pression croissante qui est exercée sur les montagnes, il s'agit dorénavant d'accorder toute l'attention nécessaire à ces questions ».

Cette année-là, l'association Mountain Wilderness organise, avec des grimpeurs de renom, une opération de nettoyage sur l'éperon des Abruzzes, la voie normale du K2 et son camp de base. On retiendra surtout l'intention de sensibiliser les ascensionnistes et les trekkeurs, à la question de la pollution en haute montagne.

Là-bas aussi, il faudra désormais trier, composter et redescendre dans les vallées.

Quant aux opérations de nettoyage, il sera fait remarquer, par un collègue résident au Népal, que le recours à une main-d'œuvre locale est de beaucoup préférable aux coûteux déplacements, pas vraiment indispensables, de visiteurs étrangers, très peu familiarisés avec le portage lourd.

Une nouvelle pratique

L'ouverture des pays d'accueil, des accès et des transports facilités, avaient déjà modifié les choses. La nouvelle façon de faire, et un état d'esprit novateur, auront définitivement changé la donne…
À partir des années 1990, avec des pratiques dérivées de la technique alpine, des prévisions météorologiques en temps réel, des transports grandement facilités et des frontières plus ouvertes, les projets d'aller vers les montagnes lointaines ne nécessiteront - pour beaucoup - plus qu'une organisation presque banale, quasiment au niveau d'un projet alpin…

Mais avec l'approche et l'altitude en plus…

Quelques périples extraordinaires

Cependant, quelques initiatives extraordinaires nécessiteront encore des organisations expéditionnaires structurées :

1985 - Nanga Parbat, pilier est-sud-est.
1989 - La traversée du Kangchenjunga.
1990 - La face sud du Lhotse.
1993 - Le versant nord du Dhaulagiri.
1995 - L'arête nord-est de l'Everest.
2001 - La première du Lhotse central.
2004 - La face nord directe de l'Everest.
2004 - La face nord du Jannu.
2007 - La face ouest directe du K2.
2007 - Le versant sud du Lhotse en hiver (tentative). 

Évidemment ces objectifs restent hors de portée des simples cordées, mais pour combien de temps encore…

LA RECHERCHE DE L'ÉCONOMIE DE MOYENS, MAIS PAS QUE...

1990 - Le versant ouest du Bhagirathi III, 6454m

<  En été 1990, première sérieuse incursion dans les grands surplombs du versant ouest du Bhagirathi III, situé dans les montagnes du Garhwal, par les Slovènes Silvo Karo et Jamez Jeglic. L'arête sud-ouest est rejointe vers 6250m. La face ouest de cette montagne, avec sa zone surplombante caractéristique, va constituer un objectif de premier ordre.

1991 - Le pilier ouest du Makalu, 8463m en 33 heures

<  En automne 1991, les 1er et 2 octobre, Erhard Loretan et Jean Trouillet escaladent le pilier ouest du Makalu, en 33 heures. Au retour, ils font le commentaire suivant : « Ce pilier de difficulté sympathique et moyenne est indéniablement le plus beau sur un 8000 ».

On pense à la remarque ironique de Mummery, en la transposant au pilier ouest du Makalu : la plus difficile escalade de l'Himalaya en 1971, une voie classique dès 1988, et une escalade rapide et sympathique pour les deux de 1991.

1991 - La face nord du Thalay Sagar, 6904m

<  En été 1991, la face nord du Thalay Sagar, - beau sommet du Garhwal - est explorée par  les Hongrois Peter Dekany et Attila Ozsvath, qui évitèrent le ressaut surplombant supérieur par la droite, en 8 jours, sommet le 17 septembre.

1991 - L'arête nord-ouest du K2, 8611m

La simple cordée, composée de Pierre Béghin et Christophe Profit, inaugure l'arête nord-ouest de la grande montagne, en technique alpine et sans soutien logistique, sommet le 15 août après deux bivouacs vers 6900m et 7950m, pour une performance de premier ordre.

1993 - Le versant nord du Dhaulagiri, 8167m

<  Au printemps 1993, ouverture d'un itinéraire direct sur le versant nord du Dhaulagiri, par une expédition russe et internationale. Depuis un dernier camp vers 7800m, sommet le 11 mai, pour un Britannique et six Russes.

1993 - Le versant sud du Bhagirathi III, 6454m

Un itinéraire est forcé sur le versant sud de la montagne, par les Tchèques Michalec et Slachta, pour la ligne « Express Tchèques ».

1994 - La face ouest du Broad Peak, 8047m

<  En été1994, le Mexicain Carlos Carsalio trace une voie nouvelle sur la face ouest du Broad Peak, à droite de la voie classique, en deux fois, et sommet le 9 juillet.

1995 - Le versant Rathiot du Nanga Parbat, 8125m

<  En été 1995, voie nouvelle versant Rathiot du Nanga Parbat par une expédition japonaise, voie originale jusqu'au Silber Sattel vers 7400m, pour rejoindre la voie de 1953. Sommet depuis un camp 4 vers 7400m, par trois grimpeurs, le 23 juillet.

1995 - L'arête sud-est du Makalu, 8463m

<  En automne 1995, l'arête sud-est du Makalu en style alpin. C'est une initiative internationale comprenant les Britanniques Andrew Collins et Jonathan Pratt, le Russe A. Nikiforov et l'Américain Dan Mazur qui réalise le parcours, en cinq jours sommet le 9 octobre et deux pour revenir.

1996 - Deux sommets de 8000

<  En été 1996, Jean-Christophe Lafaille enchaîne deux sommets de 8000 en 4 jours, sommet du Gasherbrum II, 8025m le 28 juillet, et sommet du Gasherbrum I, 8068m le 31 juillet.

1996 - L'arête nord-ouest de l'Annapurna, 8091m

<  En automne 1996, une expédition polonaise, de dix membres, remonte l'historique arête nord-ouest de l'Annapurna, depuis un camp 5 vers 7100m. Sommet le 20 octobre pour Andrzej Marciniak et l'Ukrainien Vladyslav Terzyul.

1997 - La face nord du Changabang, 6864m

<  Au printemps 1997, deux cordées tentent la face nord du Changabang, dans le Garhwal. Sommet le 1er juin pour Brendan Murphy et Andy Cave. Durant la descente Brendan Murphy est emporté par une avalanche, retour avec la seconde cordée pour Andy Cave, après un périple de seize jours.

1997 - En face ouest du Makalu, 8463m

<  Au printemps 1997, une expédition russe réussit une incursion en face ouest du Makalu, en style alpin depuis 7300m, et rejoint le pilier ouest vers 7600m. Sommet par la voie française de 1971, pour 5 d'entre eux : Alexei Bolotov, Yuri Ermachek, Dmitri Pavlenko, Igor Bugachevski et Nikolai Jiline, mort de deux compagnons Salavat Khabibulin et Igor Bugachevski durant le retour. La face ouest reste à explorer entièrement.

1997 - La face ouest du Latok II, 7108m

<  Durant l'été 1997, itinéraire sur la face ouest du Latok II, dans le Karakoram, par un quatuor allemand avec Toni Gutsh, Conrad Anker et les frères Huber. Sérieuses difficultés rocheuses jusqu'à A3 et utilisation du portaledge, pour un périple de 18 jours et le sommet le 19 juillet.

1997 - La face nord du Thalay Sagar, 6904m

<  En été 1997, sur la face nord du Thalay Sagar, dans le Garhwal, l'Australien Athol Whimp et le Néo-Zélandais Andrew Lindblade proposeront une voie plus directe que celle de 1991. En forçant un passage à gauche du ressaut surplombant supérieur en 10 jours, sommet le 19 septembre.

1997 - La face ouest du sommet nord-ouest du Nuptse, 7742m

<  En automne 1997, performance de premier ordre réussie sur la face ouest du Nuptse en 5 jours, sommet nord-ouest, le 31 octobre pour Tomaž Humar et Janez Jeclic. Ce dernier fera une chute mortelle au début de la descente, son compagnon devra bivouaquer encore deux fois pour descendre les 2300m de la face.

1998 - La face sud du Bhagirathi III, 6454m

<  Au printemps 1998, voie nouvelle sur le versant sud du Bhagirathi III, par Arnaud Guillaume et Rémi Thivel en quatre jours, du 15 au 19 mai en style alpin, pour « Les temps sauvages », l'itinéraire rejoint la voie « Express Tchèques » de Michalec - Slachta de 1993, après les principales difficultés.

1998 - La face ouest du Bhagirathi III, 6454m

<  En automne 1998, performance de premier ordre réalisée, par les Russes Vladimir Kachkov, Yuri Koshelenko et Igor Potankin, dans la face ouest du Bhagirathi III, en forçant directement la zone surplombante ; à gauche de la voie Karo-Jeglic-1990. Ascension directe des 1500 m de la face, en technique capsule, avec cinq camps et quinze jours dans la paroi. Sommet le 14 octobre, et encore quatre jours pour redescendre.

1998 - La face nord du Changabang, 6864m

<  Au printemps 1998, voie nouvelle en face nord du Changabang, dans le Garhwal, à droite de la voie de 1997, par un team de 4 Russes et un Américain, pour « Lighting route », dans un périple de vingt jours.

1999 - La face nord Thalay Sagar, 6904m

<  En 1999, sur la face nord Thalay Sagar, dans le Garhwal, une équipe russe réussit, en technique capsule, avec portaledge, une voie directe à droite du couloir central, et droit dans le ressaut supérieur, avec « High Tension », en 14 jours.

2000 - Le pilier nord-est direct du Shivling, 6543m

<  Au printemps 2000, le pilier nord-est direct du Shivling, dans le Garhwal, est escaladé par Thomas Huber et le Suisse Iwan Wolf du 29 au 31 mai. La partie originale du pilier direct, appelée « Shiva's line », comporte des difficultés importantes avec A4 et 6b.

2000 - La face nord-ouest du Spantik, 7027m

<  Au printemps 2000, sur la face nord-ouest du Spantik, dans le Karakoram, reprise de la voie anglaise (Fowler-Saunders-1987) par le Slovène Marko Prezelj, le Hongrois Attila Oszvath et les Français Emmanuel Guy et Emmanuel Pellissier. En 5 jours, du 12 au 16 juin et en très bon style…
<  Appartenant à la même initiative, les Russes Alexander Klenov et Mikhail Devy, réussissent un itinéraire nouveau de haute difficulté, à gauche de la voie anglaise, sur le piler nord-ouest proprement dit du Spantik, en 13 jours, du 7 au 18 juin. Directement, sans équipement préalable, hauteur 2000 m et difficulté jusqu'à 7a et A3, une performance exceptionnelle…

2001 - Le pilier sud Baintha Brakk, 7285m

<  En 2001, pilier sud du Baintha Brakk, dans le Karakoram, est exloré par Thomas Huber, Urs Stocker et Iwan Wolf.

2001 - La première ascension du Lhotse Central, 8413m

<  Au printemps 2001, première du Lhotse Central. C'était l'un des objectifs majeurs de l'himalayisme de haut niveau de ces années-là.

L'expédition russe comprenait onze membres, chef Serguei Timofeev. Elle réussira la première exploration du dernier 8000 restant à gravir, en procédant très astucieusement, via le Col Sud de l'Everest et en contournant par le nord le sommet principal du Lhotse, 8516m. Sommet les 23, 24 et 25 mai pour dix des participants.

2002 - La face nord du Siguniang Shan, 6250m

<  Au printemps 2002, le Siguniang Shan, par la face nord, pour les Britanniques Mike Fowler et Paul Ramsden, en technique alpine (ED+/Scottish VI) et en 6 jours du 15 au 20 avril. Sommet situé dans la province du Sichuan en Chine aux confins est de l'Himalaya. Après cette performance de premier ordre, il faudra encore deux jours pour revenir par l'arête nord, jamais explorée jusque-là, et bordant à gauche la face escaladée.

2003 - Le pilier sud-est du Nuptse, 7804m

<  En 2003, le pilier sud-est du Nuptse sera resté pendant plus de vingt ans l'ambition des himalayistes les plus actifs. Ce pilier soutient le sommet est du Nuptse, encore vierge de présence humaine, ce qui ajoutait un intérêt supplémentaire au challenge. Les Russes Valéry Babanov et Youri Koshelenko se portent au sommet en 6 jours, le 2 novembre, après l'installation d'un camp 2 vers 6900m et l'utilisation de cordes fixes jusque vers 6400m.

2003-2004 - La face nord du Thalay Sagar, 6904m                 

<  En automne 2003, la face nord du Thalay Sagar. Ce beau sommet du Garhwal continue d'inspirer beaucoup de monde, Stéphane Benoist et Patrice Glairon-Rappaz explorent la partie gauche de la face avec « One way ticket ».
<  Au même moment, les Bulgares Hristo Hristov et Nikola Levakov inaugurent « Between the light and the shadow », en parcourant la partie droite de la face nord.
<  En automne 2004, un sixième itinéraire de grande qualité et de grande difficulté est inauguré, par les Suisses Denis Burdet, Thomas Senf, Stéphan Siegrist et Ralph Weber. La nouvelle voie remonte les deux imposants piliers limitant à droite la face nord, pour rejoindre la crête nord-ouest. Encore à droite de la voie bulgare de 2003, avec 1500m, 6a/A3 et 5/M6, la ligne est appelée « Harvest Moon ». Le sommet est atteint le 27 septembre après l'installation de deux camps, vers 5800 et 6400m, et onze jours d'escalades effectives.

 2004 - La face nord du Jannu, 7710m

<  Au printemps 2004, la face nord du Jannu est gravie en technique traditionnelle, par une entreprise russe de onze membres, chef Alexander Odintsov.

C'est un des objectifs emblématiques qui est atteint, venant après des déclatations fantasmées d'un grimpeur solitaire.

Camp de base le 5 avril, vers 4600m. Les cordes fixes dès 5100m. La voie est explorée, longueur après longueur, certains jours l'avancée n'est que de trente mètres, les grimpeurs devront franchir des obstacles considérables à pareille altitude avec 6b et A3. Les 7500m sont atteints le 17 mai. Un camp sur portaledge devra être encore placé le 19 mai, vers l'altitude record de 7400m pour un pareil instrument. Les cordes fixes devront être placées jusqu'à plus de 7600m.

La délivrance n'arrivera qu'avec le sommet, le 26 mai, pour Alexander Ruchkin et Dmitry Pavlenko. La paroi est haute de quelque deux mille cinq cents mètres.

La réussite de cette exploration nécessitait - certainement - les considérables moyens utilisés par les Russes, le nombre et la qualité des grimpeurs, car toutes les initiatives précédentes, plus légères, durent renoncer au pied des grosses difficultés du bouclier central. Les obstacles rencontrés, dans la partie supérieure, confirment l'importance de l'objectif et crédibilisent les moyens mis en œuvre, pour la réussite de l'opération.

2007 - La face ouest directe du K2, 8611m

< Après un siège long de deux mois et demi, une équipe russe a pu gravir la face ouest directe du K2, sommet le 22 août pour Andrey Mariev et Vadim Popovich, le lendemain pour neuf membres.

2007 -  Le pilier nord-est du Shipton Shire, 5885m

<  Durant l'été 2007, sur le pilier nord-est de Shipton Shire, l'alpiniste catalane Silvia Vidal a laissé une trace solitaire fantastique de 32 longueurs et 1300m de haut (870m extrêmes) en vingt jours en style capsule, et une semaine de mauvais temps. Les difficultés techniques atteignent A4+ en escalade artificielle, pour « La vie est couleur lilas ». Un « Big wall » du groupe de Trango dans le Karakorum.

2009 - Le versant sud-est du Cho Oyu, 8201m

<  Au printemps 2009, voie nouvelle en impeccable style alpin, pour les Kazakhs Boris Dedeshko et Denis Urubko dans le haut versant sud-est. La nouvelle ligne très directe haute de 2800 mètres se déroule à gauche du pilier sud-est de l'expédition polonaise de 1985. Cinq jours pour le sommet le11 mai, et trois bivouacs pour revenir… Denis Urubko, en réalisant cette performance de premier ordre, en termine d'une façon brillante avec son challenge de gravir les quatorze 8000.

2011 - Le spigolo est du Meru central, 6450m

<  En été 2011, depuis plusieurs années, le spigolo est du Meru central, dans le massif du Garhwal retient l'attention et sera l'objet de nombreuses tentatives et convoitises… Un spigolo en forme d'aileron de requin, le « Shark Fin » très monolithique... Après un échec en 2008, où leur tentative durera 19 jours, succès pour les Américains Conrad Anker, Jimmy Chin et Renan Ozturk, en style capsule, avec portaledge, du 21 septembre au 2 octobre, pour 1400m/VI/6a/A4/M6. Grosses difficultés d'escalade artificielle A4, avec le raffinement nécessaire à ce genre d'exercice, et escalade exposée avec progression sur crochets…

2011 - La face ouest du Latok III, 6949m

<  Au printemps 2011, le Latok III est situé dans les montagnes du Karakoram, sa face ouest est réussie par une équipe russe du 10 au 25 juin, avec 9 camps sur portaledges. Quinze jours pour forcer un itinéraire ardu de 1700m, par Evgeny Dmitrienko, Ivan Dozhdev, Alexey Lonchinsky et Alexander Odintsov.

2012 - Le pilier nord-est de la tour de Muztagh, 7284m

<  Dans le Karakoram, durant l'été 2012, par un périple de 17 jours et malgré des conditions difficiles, les Russes Dmitry Golovchenko, Alexander Lange et Sergey Nilov escaladent le pilier nord-est de la tour de Muztagh, haut de quelque 2000m.

2012 - Le versant sud Baintha Brakk, 7285m

<  Dans le Karakoram, durant l'été 2012, ascension par le versant sud du Baintha Brakk, pour la cordée nord-américaine Kyle Dempster et Hayden Kennedy, du 19 au 22 août 2012.

2012 - La face ouest du Kamet, 7756m

<  Dans le Garhwal, en automne 2012, la face ouest du Kamet est gravie, par Sébastien Bohin, Didier Jourdain, Sébastien Moatti et Sébastien Ratel.

2012 - Le pilier nord-est de Shiva, 6142 m

<   Dans l'Himachal Pradesh, en automne 2012, le magnifique pilier nord-est de Shiva : le Prow of Shiva - la proue de Shiva - est parcouru par la cordée de Mick Fowler et Paul Ramsden, ils réalisent l'exploit en octobre, en sept jours, plus deux pour revenir par le flanc sud-est inexploré.

2012 - L'arête Mazeno du Nanga Parbat, 8125m

L'arête ouest de Nanga Parbat, dite « arête Mazeno », est célèbre pour son long développement de quelque dix kilomètres, depuis le Col Mazeno. Elle est défendue par une succession de pointes individualisées, proches ou dépassant les 7000m, séparées par de sensibles dépressions.

Les tentatives les plus notables datent de 1992 et 1995. Elles n'avaient pas dépassé le troisième sommet de l'arête (Pointe 6970m).

<  En 2004, la cordée nord-américaine, composée de Doug Chacot et Steve Swenson, réussissait le parcours de la crête inexplorée en cinq jours et s'avançait jusqu'à la jonction avec la voie Schell, au Col Ouest de la montagne. Mais elle devait renoncer au sommet, en redescendant par le versant Diamir.
<  En 2012, périple sur l'arête pour six ascensionnistes qui atteignent le Col Ouest, en huit jours de traversée. Après une tentative vers le sommet, la Sud-Africaine Cathy O'Dowd et trois assistants pakistanais renoncent et descendent par la voie Schell du versant Rupal. Les Britanniques Rick Allen et Sandy Allan décident de persévérer, et réussissent le sommet, et la première par cette fameuse arête Mazeno. Écrivant une belle page de l'histoire de l'alpinisme, retour par le versant Rupal de la voie Shell, pour une aventure de 18 jours.

ASCENSIONS HIVERNALES

Depuis les années 1980, en réalisant l'essentiel des premières hivernales des sommets dépassant 8000m, les Polonais ont montré la voie.

Jerzy Kukuczka et Krzysztof Wielicki en étaient devenus de véritables spécialistes.

<  D'abord le Chomolangma-Everest, le 17 février 1980 par Leszek Cichy et Krzysztof Wielicki.

<  Sur les quatorze 8000, nos collègues polonais seront présents sur 10 d'entre eux…

- Le Manaslu, en 1984.
- Le Dhaulagiri et le Cho Oyu, en 1985.
- Le Kangchenjunga, en 1986.
- L'Annapurna, en 1987.
- Le Lhotse, le 31 décembre 1988, par une cordée italo-polonaise.
- Le Shishapangma est gravi par Jean-Christophe Lafaille, en solitaire, sur un itinéraire original, le 11 décembre 2004, et par une cordée italo-polonaise en janvier 2005... Avec quelques polémiques sur la date extrême de la réalisation du Français.
- Le Makalu, en 2009, échappe à nos collègues polonais devancés par l'Italien Simone Moro et le Kazakh Denis Urubko.
- Le Gasherbrum 2, en 2011, est atteint par l'Italien Simone Moro, le Kazakh Denis Urubko et le Nord américain Cory Richards.
- Le Gasherbrum 1, en 2012, par une initiative polonaise, sans l'assistance de l'oxygène respiratoire, conditions atmosphériques extrêmes, températures descendant à -35 degrés Celsius et vent soufflant parfois à plus de 100 km/h… Sommet pour Adam Bielecki et Janusz Golab, le 9 mars 2012.
- Le Broad Peak, le 5 mars 2013, les Polonais Maciej Berbeka, Adam Bielecki, Tomasz Kowalski et Artur Małek réalisent l'ascension, malheureusement Berbeka et Kowalski ne reviendront pas.
- Le Nanga Parbat est gravi le 26 février 2016, par l'Italien Simone Moro, l'Espagnol Alex Txikon et le Pakistanai'Ali Sadpara. L'italienne Tamara Lunger participe à la première ascension hivernale, mais elle doit laisser ses trois compagnons gagner le sommet, devant elle-même céder à 70m d'altitude du Graal.

Il ne restait plus que le K2, sérieusement tenté en 2003 par nos confrères polonais, à ne pas avoir été visité en hiver. C'est chose faite par une forte expédition népalaise le 16 janvier 2021. Avec Sona Sherpa, Mingma Gyalje, Dawa Tenzing, Kilu Pemba, Nims Dai sans oxygéne, Mingma David, Dawa Temba Sherpa, Pemchhiri Sherpa, Gelje Sherpa et Mingma Tenzi Sherpa, montrant la belle qualité des grimpeurs népalais.

Le versant sud du Lhotse, 8516m - en hiver

Signalons aussi les tentatives sur le versant sud du Lhotse en hiver, par des grimpeurs japonais conduits par Osamu Tanabe. En décembre 2000, tentative jusqu'à 7600m, en reprenant l'itinéraire slovène de mai 1981.

<  En 2003, on reprend la même voie jusqu'à un camp 3 vers 7850m. Osamu Tanabe décide d'une traversée descendante vers la droite, pour rejoindre le grand couloir caractéristique, en plein centre de la paroi, séparant le sommet principal d'une antécime vers l'est. Les grimpeurs atteignent 8250m.
<  En 2007, même itinéraire qu'en 2003. Le 27 décembre, Osamu Tanabe, Takahiro Yamaguchi et Pemba Chorten Sherpa, depuis un camp 3 vers 8000m, font une tentative décisive, l'arête sommitale est rejointe vers 8475m, quand les trois doivent renoncer si près du sommet…
Tout reste à refaire, mais ne doutons pas un instant de la ténacité et de la détermination de nos collègues japonais…

Cet objectif majeur de l'Himalaya, tenté dans des conditions hivernales, est une aventure extraordinaire. Une paroi mythique, un itinéraire original dans la partie supérieure, une ligne complexe d'une rare élégance, exécutée dans les rigoureuses contraintes hivernales, par des grimpeurs particulièrement motivés.
La face sud n'a connu qu'un parcours pendant la post-mousson de 1990, par la crête située à droite du grand couloir.

Une performance hivernale provisoirement inachevée, qui entre déjà dans la grande histoire de l'ascensionnisme.

LE SKI EN TRÈS HAUTE ALTITUDE

Les performances extraordinaires, réalisées dans le domaine du « ski extrême » dans les Alpes, peuvent parfaitement être appréhendées et appréciées, par les alpinistes, les skieurs et aussi par un plus grand public. Mais la transposition, sur les très hauts sommets himalayens, réclame quelques discernements.

Avec la grande complexité d'exécution due à l'altitude, à l'éloignement, aux conditions de la neige, et à l'impossibilité de reconnaissance et de préparation (voir le dossier du CFD : La pratique hivernale de la montagne).

 

LES QUATORZE HUIT MILLE

L'enchaînement des quatorze sommets, dépassant l'altitude de huit mille mètres, est un challenge disputé et marquant pour les himalayistes.

<  En 1986, Messner termine d'une façon convaincante un circuit, qui semblait impossible lorsqu'il avait envisagé de gravir les quatorze 8000, sans utiliser l'oxygène
<  En 1987, Jerzy Kukuczka réussit le challenge des quatorze 8000, d'une façon encore plus achevée, en réalisant plusieurs itinéraires originaux ou ascensions hivernales.
<  En 2012, le périple est déjà entrepris par 27 protagonistes.

C'est maintenant aux femmes de se présenter.

<  En 2009, quatre d'entre elles avaient réussi douze ascensions, dont l'Everest et le K2.
<  En 2009, la Sud-coréenne Oh Eun-Sun avait atteint le Kangchenjunga, le Dhaulagiri, le Nanga Parbat et le Gasherbrum I dans la même année…
<  Et le 27 avril 2010, Oh Eun-Sun termine sa ronde des 8000 par l'Annapurna… avec organisation et assistance conséquentes.
<  Le 17 mai, l'alpiniste espagnole basque Edurne Pasaban avec le Shishapangma, 8027m achève le même challenge.
<  Dans le début du nouveau siècle, deux personnalités vont marquer le domaine de la très haute altitude, en réalisant l'enchaînement des quatorze sommets dépassant l'altitude de huit mille mètres d'une manière probante et d'une haute exigence.
- Gerlinde Kaltenbrunner en 2011, sans utiliser l'oxygène et sans l'assistance des porteurs d'altitude.
- Nives Meroi en 2016, pas d'oxygène, pas de porteur d'altitude, et en autonomie depuis les camps de base (voir le dossier du CFD : L'alpinisme au féminin).

 

LES PAROIS ROCHEUSES DANS LES TOURS DE TRANGO

L'évolution des techniques, du matériel et la qualité sportive des hommes et des femmes, s'apprécient également sur les grands monolithes du massif de Trango, situé dans les montagnes du Baltoro Mustagh du Karakoram.

Des escalades presque entièrement rocheuses, qui situent le niveau atteint en escalade au-dessus de 6000 mètres.

La Tour Sans Nom, 6240m

<  En 1976, la première de la tour la plus caractéristique et la plus difficilement accessible, la « Trango Nameless Tower », revient aux britanniques Anthoine-Boysen-Brown-Howells, par le versant sud-est.
Depuis, une dizaine au moins d'itinéraires, de quelque mille mètres de haut, parcourent les faces de ce puissant monolithe du  massif de Trango, sans aucun itinéraire commode.

Eternal Flame Route

Parmi ces itinéraires, une ligne retient particulièrement l'attention des grimpeurs de haut niveau : « Eternal Flame Route », dans la face sud-est.

<  En 1989, Kurt Albert, Wolfgang Güllich, Christof Stiegler et Milan Sykora avaient forcé une ligne nouvelle sur la splendide paroi, entre la voie britannique 1976 et une ligne slovène de 1987. La ligne avait été repérée l'année précédente, en libérant la voie slovène.
L'itinéraire haut de 800m était achevé au final par la cordée Kurt Albert et Wolfgang Güllich.
Avec des difficultés annoncées de 7b et A2, ces grimpeurs ouvraient la voie à l'escalade sportive dans l'Himalaya... Trente-et-une longueurs sont libérées, quatre seulement résistent et imposent l'aide de l'escalade artificielle.

Depuis, les meilleurs grimpeurs ont voulu apporter leur contribution pour un enchaînement intégral en libre.

<  En 2003, Toni Arbonès, Nicolas Zambetti et Denis Burdet « libèrent » la plus grande partie de l'itinéraire… mais le problème restait.
<  En 2005, un quatuor français, comprenant Stéphanie Bodet, Christophe Dumarest, Arnaud Petit et François Petit, reprenait le challenge, sans pouvoir conclure.
<  En 2005 toujours, les frères basques espagnols Iker et Eneko Pou découvrent une variante très dure, mais le mauvais temps les contraindra à renoncer, mais l'idée de contourner les zones monolithiques était dans l'air.

<  Durant l'été 2009, les frères Alexander et Thomas Huber se présentent, découvrent et inaugurent deux variantes, permettant l'escalade libre et de réussir le challenge convoité.
Escalade du 11 au 14 août, avec comme difficulté annoncée 7c+…

La Grande tour de Trango, 6286m

La Grande tour est gravie pour la première fois par Galen Rowell, John Roskelley, Kim Schmitz, Jim Morrissey et Dennis Hennek, durant l'été 1977, sur le versant ouest.

<  En 1984, inauguration d'une voie norvégienne par Hans Christian Doseth et Finn Dæhli sur la face est, mais le retour sera fatal aux deux protagonistes.
<  En 1992, Xaver Bongard et John Middendorf réalisent « Le Grand Voyage », une voie parallèle à la précédente.

<  En été 1999, sur le sommet ouest 6220m, deux itinéraires de très grandes envergures qui ont nécessité tous les raffinements de l'escalade libre et artificielle modernes, sont concrétisés sur la face nord-ouest.

- Une cordée nord-américaine réussit un itinéraire original en 36 jours avec A. Lowe, J. Ogden et M. Synnott, pour une ligne de 2000m avec 6c et A4. Les opérations d'escalade ont duré 5 semaines, une attaque le 24 juin et sommet le 29 juillet, équipement de cordes fixes pour « Parallel worlds ».
- Au même moment, les Russes Y. Koshelenko, A. Odintsov, I. Potankin et I. Samoilenko tracent une voie nouvelle contiguë et parallèle, du même calibre, un peu plus à droite. Mêmes conditions et mêmes performances, en 23 jours et sommet le 10 août pour la « Russian route ».
- Les deux entités se rencontrent le 22 juillet sur une même vire, et décident d'une très sympathique coopération, pour achever ce double exploit.

<  En 2004, les Nord-américains Kelly Cordes et Josh Wharton réalisent la première de la crête sud-ouest. L'itinéraire appelé « Azeem Ridge » est long de plus de 2000m de dénivellation, avec des difficultés de 5.11/A2/M6, en cinq jours du 24 au 28 juillet et en technique alpine.
<  En 2005, les Slovaques Dodo Kopold et Gabo Čmárik inaugurent une nouvelle voie dans le versant sud-est à droite d'Azeem Ridge. Très long itinéraire de plus de 2000m de dénivellation, avec des difficultés de 5.11+ et A2 (soit jusqu'à 6c+), en huit jours du 4 au 11 août et en technique alpine.
<  En été 2007, deux équipes de jeunes grimpeurs russes de Krasnoyarsk réalisent deux nouvelles voies extrêmes. La première à proximité de Russian route de 1999, sur la face nord-ouest en cinq jours, et pour la seconde, dans la partie gauche de la face en onze jours. Il s'agit d'un très bel exploit montrant le dynamisme des grimpeurs russes.

La Chaire de Trango, 6050 m 

<  En 2005, première d'une ligne du type « big wall » sur Trango Pulpit, comprenant une trentaine de longueurs, avec plusieurs secteurs annoncés A3/A3+. Dix-sept jours en style capsule et utilisation du portaledge seront nécessaires à Sam Beaugey, Martial Dumas, Jean-Yves Frederiksen et Yann Mimet, pour gagner, dans le mauvais temps, le sommet de l'itinéraire, en renonçant à la crête sommitale. 
La ligne est appelée « Azazel », par les auteurs de l'exploit, et Sam Beaugey au seizième jour a réalisé le « jump » de la paroi.

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À propos de l'aide à la performance

L'aide à la performance a toujours préoccupé les ascensionnistes, en venant s'ajouter à l'entraînement et à la volonté, pour atteindre l'exceptionnel.

L'oxygène respiratoire

L'oxygène respiratoire était en discussion dès les tentatives d'ascension pour affronter la grande altitude, elle est utilisée par les aéronautes, et les aviateurs, depuis leurs débuts et après avoir constaté les dangers de la raréfaction de l'O2.

Dès le début de l'exploration des plus hauts sommets, la connaissance des limites d'adaptation de l'homme restera inconnue , malgré les expériences constatées chez les mineurs des hauts plateaux d'Amérique du sud.

L'O2 sera utilisée dès les premières explorations des très hautes montagnes, même avant la Grande Guerre, et sera l'objet de controverse chez les ascensionnistes.

En 1922 

Pour la première tentative d'ascension du Chomolangma-Everest par l'expédition britannique de 1922, l'utilisation de l'oxygène est conseillée au-dessus de 7500m par le scientifique G. Dreyer qui avait étudié la façon de l'utiliser pour l'aviation militaire britannique. 

L'altitude de 8170m est atteinte durant une tentative de Edward Felix Norton, George Mallory et Howard Somervell, sans l'aide de l'oxygène.

Des appareils à oxygène, encore peu maniables, seront expérimentés par l'Australien George Finch, en apportant quelques améliorations techniques. L'altitude de 8300m sera gagnée durant une tentative, avec l'assistance de l'oxygène, par George Finch et Geoffrey Bruce.

Mais durant une dernière tentative, sept Sherpas périssent dans une avalanche, en remontant les pentes soutenant le Col Nord.

En 1924 

Pour la seconde expédition britannique sur la grande montagne, depuis un camp vers 8150m, la cordée d'Edward Felix Norton et de Howard Somervell tente l'ascension. Norton bientôt seul atteint 8500m, sans utiliser l'oxygène respiratoire.

Malheureusement durant une nouvelle initiative d'ascention, en ayant recours à l'oxygène respiratoire, George Mallory et Andrew Irvine disparaissent dans les pentes supérieures de la montagne, sans vraisemblablement dépasser le second ressaut de l'arête nord-est, situé à 8500m.. L'éventualité que la cordée puisse avoir atteint le sommet est un sujet inépuisable, depuis plus d'un siècle.

Les Britanniques vont effectuer sept tentatives malheureuses, par le versant tibétain, avant la Seconde Guerre mondiale sans dépasser l'altitude atteinte par Norton en 1924, qui demeurera la plus haute altitude atteinte jusqu'en 1952.

La première

Et le 29 mai 1953, 11h30, le « Toit du monde », Chomolangma-Everest, 8850m est gravi par Edmund Hillary et Norgay Tensing Sherpa en ayant recours à l'oxygène. Les deux du sommet entrent dans la légende.

Au printemps 1978, première ascension sans oxygène le 8 mai, par Peter Habeler et Reinhold Messner.

En été 1980, la face nord est gravie en solitaire et sans oxygène par le Couloir Norton. C'est Reinhold Messner qui accomplit cet exploit extraordinaire ! Le sommet est atteint le 20 août, après trois bivouacs. Il faudra encore deux jours pour revenir.

Cette ascension du toit du monde de Messner, sans utiliser l'oxygène respiratoire, est totalement convaincante, à l'inverse de celle de 1978, où la cordée évoluait sur l'itinéraire classique parcourant le versant népalais, en bénéficiant de la trace qui est primordial dans les pentes de neige.

Au fil du temps tous les sommets seront atteints sans l'aide de l'oxygène, sauf sur les grands 8000, pour les itinéraires de haut niveau, où plusieurs bivouacs sont nécessaires au-dessus de 8000.

L'industrie de l'Everest en 2020

Du fait de sa prééminence Chomolangma-Everest devient un puissant appel pour l'ensemble de ceux qui sont à la recherche d'un sujet d'aventure,  peu ou pas du tout formés, peu ou pas du tout entraîné.

Sur la voie classique népalaise au début de notre siècle, une équipe de Sherpas va tenir ouvert l'accès de la cascade de glace, premier et principal obstacle de l'ascension.

En 2020, l'industrie de l'Everest est désormais assurée par les autochtones Sherpas népalais, pour permettre aux audacieux, peu ou pas expérimentés, l'accès au plus haut sommet du monde. De véritables entreprises industrielles permettant aux moins aguerris d'atteindre leur quête du Graal, le long de cordes fixes installées chaque mois de mai, le moment favorable, installées par des Guides Sherpas, assurant l'exclusivité des tentatives et retirant à ce sommet  tout intérêt d'ascension aux alpinistes.

Les progrès de la téléphonie, de la météorologie de l'héliportage permettant de proposer un produit fiable aux candidats à l'Everest.

Dans le cadre des entreprises commerciales vers l'Everest, le temps à consacrer au projet d'ascension, le voyage, l'acclimatement nécessaire, l'ascension, étaient des obstacles pour le développement de la proposition. On va chercher à raccourcir le temps à affecter à l'opération : accès par hélicoptère, préacclimatement accéléré sous tente hypoxique et enfin utilisation d'un gaz rare, le Xénon, comme accélérateur d'acclimatement, qui demande encore une étude médicale pour être proposable.

Disons enfin que cette aventure particulière, sur cordes fixes, sans signification alpine particulière, nécessite un solide compte en banque et aussi une certaine détermination, avec la conscience du danger de la haute altitude.

Mais l'acclimatement et l'oxygène ne sont pas les seules aides.

Divers produits dopant seront utilisés par les plus malins, par les plus filous.

Depuis 1950 et peut-être avant, divers produits viendront en assistance, au début sans poser de questionnement.

Avec le développement des sports de compétitions et l'aide obtenue par les petites pilules de couleurs, les produits caractéristiques du dopage médicamenteux, cette assistance utilisée pour certains 8000m (et pour d'autres ascensions dans les Alpes) va interroger. 

Comme l'alpinisme n'est pas un sport de compétition, encadré par des règles précises, chacun reste libre de ses usages médicaux. Il sera difficile de trier entre l'aide à la performance et un emploi éventuellement plus justifié pour sortir en catastrophe d'un piège mortel en haute montagne.

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 LES GRANDES LIGNES DE L'ACTIVITÉ

Cette présentation n'est évidemment pas exhaustive, il n'est question ici que de proposer les grandes lignes de l'activité, qui demanderaient évidemment à être complétées ou revisitées.
Il faudra donc aussi regarder en Patagonie, dans les Andes, dans les montagnes d'Alaska, et du Canada, du Groenland, et des montagnes d'Asie.
Dans chaque massif de montagne, il existe des itinéraires historiques ou de haut niveau qui méritent d'être soulignés, ici, il n'est principalement question que des montagnes de l'Himalaya et du Karakoram.

Une vision partielle forcément partielle de la grande exploration des montagnes, depuis le moyen Âge jusqu'à la fin du XXe siècle.

Les performances proposées revoient aux Chroniques alpines de la revue La Montagne & Alpinisme, et aux autres bulletins spécialisés.

 L'actualité récente est rapportée par la Chronique alpine de la revue La Montagne & Alpinisme, conduite depuis 2017 par Rodolphe Popier très impliqué dans l'actualité des ascensionnistes d'aujourd'hui et particulièrement bien informé.

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En guise de conclusion

La réflexion de Pierre Dalloz qu'il adressait dans les années 1930 aux générations successives : 

« Nous aussi, nous avons étonné nos devanciers, nous leur avons donné aussi des regrets, en surmontant comme en se jouant certaines parois devant lesquelles ils avaient dû se récuser. La technique et l'entraînement en se perfectionnant toujours reculent les limites, mais le registre humain lui ne change pas. Les auteurs des escalades d'hier ont eu le même mérite à oser passer outre que les champions de l'inaccessible du moment présent ».

 

LES SUITES DE LA CHRONOLOGIE DE CE DOSSIER DEVRONT ÊTRE AJOUTÉES ULTÉRIEUREMENT

 

CONSULTATION

La plupart des textes concernant l'historique de la montagne et de la FFCAM sont disponibles au Centre fédéral de documentation de la FFCAM,  24, avenue de Laumière, 75019 Paris.

Notamment dans les différentes publications :

- Les Annuaires du CAF, de 1874 à 1903.
- Les Bulletins du CAF, de 1876 à 1903.
- La Montagne, de 1904-1905 à 1954.
- Alpinisme, de 1925 à 1954.
- La Montagne & Alpinisme, depuis 1955.
- Les Annales du GHM, de 1955 à 2001 et Cimes, de 2002 à 2015.

Les livres constituant la bibliothèque de la FFCAM sont tous référencés.

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Il suffit de saisir un mot caractéristique ou un des mots clés d'un ouvrage recherché, dans l'un des champs appropriés (auteur, titre, sujet, année d'édition) et vous aurez accès aux références.

Accès aux publications

Vous pouvez rechercher en ligne les titres suivants :

 - Les Annuaires du CAF, de 1874 à 1903, consultables sur le site de la Bibliothèque nationale : http://gallica.bnf.fr
- Voir aussi : www.archive.org et utiliser le mot clé : club alpin français.
- Les Bulletins du CAF, de 1876 à 1903, consultables sur le site de la Bibliothèque nationale : http://gallica.bnf.fr
- La Montagne, de 1904-1905 à 1954, consultables sur le site de la Bibliothèque Nationale : http://gallica.bnf.fr
- La Montagne & Alpinisme, depuis 1955, consultables sur le site de la Bibliothèque nationale : http://gallica.bnf.fr
- Enfin, Alpinisme, de 1926 à 1954, accessibles sur le site du GHM, avec Les Annales du GHM (1955-2001) et Cimes (2002-2015).

Un site bien informé :

8000ers.com est le site vitrine des activités d'Eberhard Jurgalski, géographe allemand en activité depuis presque 4 décennies et considéré comme l'alter ego de Miss Elizabeth Hawley pour les chroniques himalayennes. Les rapports présentés sont le fruit de 7 années de travaux supervisés par Eberhard et menés en particulier par Tobias Pantel (pour le Manaslu) et par Rodolphe Popier (pour l'Annapurna I et le Dhaulagiri I).

L'équipe comprend également Damien Gildea (spécialiste des montagnes de l'Antarctique), Bob Aubertijn Shelfhout et Thaneswar Guragain, qui ont tous trois également contribué à la réalisation de ces travaux.