Les cartes géographiques

Les cartes géographiques sont les compléments indispensables de toutes nos pérégrinations, un guide-itinéraires n'est rien sans la carte.
Sommaire :
- Inventaire
- Un peu d'histoire
- La carte d'état-major au 1/80 000e
- Les cartes précises des montagnes
- 1903 - La Commission de topographie
- La désignation des lieux de montagne
- L‘œuvre de Paul Helbronner
- 1906 - La carte au 1/50 000e
- 1920 - La carte Vallot
- 1922 - La carte au 1/50 000e en couleur
- 1923 - La Commission des travaux scientifiques
- 1940 - L'Institut Géographique National
- 1973 - La nouvelle carte au 1/25 000e
- 2000 - Les cartes et guides européens
- Les altitudes des montagnes
Inventaire
- Environ 1000 cartes géographiques sur la plupart des grands massifs du monde sont en rayon et en consultation sur place au Centre Fédéral de Documentation.
Elles sont indexées et référencées dans une base de données, qui n'est pas accessible par internet, avec 1066 références. - Un fond riche et unique des cartes anciennes conservées pour leur intérêt historique.
Voici quelques exemples :
- cartes du Mont Blanc de Viollet-le-Duc de 1876
- cartes du Mont Blanc d'Henri et Joseph Vallot de 1920
- cartes Pyrénéennes de Franz Schrader
- carte de l'expédition du Duc d'Abruzzes au Baltoro en 1910
- cartes des Andes chilo-argentines de 1914
- cartes du Hielo Patagonico Sur et Norte de 1947
- cartes du Maroc, 79 cartes rares
- cartes du Karakoram
- cartes du Népal, etc.
Un peu d'histoire
Les érudits situent le premier document cartographique six siècles avant notre ère, et une première carte est attribuée à Ptolémée, au second siècle.
La carte dessinée du monde connu, par Muhammad al-Idrisi, sera une référence datée de 1154, et en 1519, une carte portugaise montre la partie explorée du globe, une carte de France existe dès 1747.
Mais, la première carte générale plus précise du royaume de France, la carte de Cassini, obtenue par triangulations, est commencée sous le règne de Louis XV en 1756, par Cassini de Thury et sa famille, et achevée en 1815, elle n'avait abordé les montagnes que de loin.
La possession des cartes géographiques exactes était vitale pour les forces armées, afin de remplacer celles discutées des Cassini.
Une commission est créée en 1817, relayée par le Bureau de cartographie et d'archives à intérêt militaire de l'armée française en 1824, pour l'établissement d'une carte à usages militaires et administratifs.
La structure commanda aux géodésiens militaires l'établissement de la carte topographique générale de la France, et dès 1823 fait entreprendre la triangulation des zones de montagne.
C'est venant du corps des ingénieurs géographes militaires, à l'origine tous polytechniciens, que quelques-uns s'illustrèrent dans les travaux de la carte de France dès 1825, en entreprenant des ascensions remarquables, pour la triangulation des Pyrénées, puis des Alpes (voir le dossier du CFD : Un historique de l'alpinisme de 1492 à 1914 / Les officiers géographes de la carte de France).
Ils avaient également déterminé l'altitude du Mont Blanc en 1802, un moment sur le territoire national de 1796 à 1814.
Ils avaient désigné en 1824 et mesuré en 1830 la Pointe des Arsines, alors le plus haut sommet du territoire national, et devenue la Barre des Écrins, 4102m.
La triangulation
La triangulation permet, depuis les deux points connus de la base d'un triangle, de viser un repère éloigné bien identifié (clocher d'église, tour, accident de terrain bien repérable), qui sera le troisième point et sommet du triangle, et avec les mesures d'angle depuis les deux points connus, de calculer les éléments du triangle, sans avoir à mesurer de distances. Une méthode déjà suggérée par le philosophe et savant Thalès 600 ans avant J.-C.
Le niveau à bulle, le théodolite et la planchette facilitaient les relevés d'angles horizontaux et verticaux.
La triangulation générale de la France de 1818 à 1875 comprenait les chaînes méridiennes de Paris, de Bayeux, de Sedan et les chaînes parallèles de Paris, Amiens, Bourges, Clermont, Rodez et des Pyrénées. Les visées portaient sur 20 à 40 km suivant les reliefs rencontrés. La meilleure précision était obtenue par des tracés proches de triangles équilatéraux.
C'est en montagne que la cartographie sera le plus difficile à établir.
La carte d'état-major au 1/80 000e
Un long travail se poursuivra de 1818 à 1875 pour l'établissement de la carte de France à l'échelle 1/80 000e, qui sera appelée carte d'état-major, pour remplacer celle des Cassini.
< Pour les Pyrénées, les travaux de géodésie se déroulent dès 1825 ; pour les Alpes les levés commencent en 1828, dans les zones les plus tourmentées du Dauphiné. Cela ne concernera pas immédiatement la Savoie, encore dans les États sardes jusqu'en 1860, la carte sera publiée à partir de 1866 et jusqu'en 1875.
Les cartes précises des montagnes
À ce moment dans les montagnes, des erreurs grossières avec des sommets fictifs étaient véhiculées par différents supports.
< En 1865, édition de la carte d'Adams Reilly de la chaîne du Mont Blanc, au 1/80 000e, suite à une série de relevés réalisés par l'auteur en 1863 et 1864, à titre privé, la carte est patronnée par l'Alpine Club. C'est la première carte représentant correctement la chaîne du Mont Blanc dans son ensemble. On pourra juger de l'excellence du document dans la reproduction publiée dans la revue La Montagne & Alpinisme n°1/1986, en double page.
< En 1867, édition de la carte Mieulet de la chaîne du Mont Blanc, échelle 1/40 000e, suite à une série de relevés réalisés en 1863 et 1864, par le capitaine Mieulet pour l'état-major français, après le rattachement de la Savoie à la France de 1860. On dispose d'un second excellent document sans erreur grossière, ni sommet fictif.
< En 1876, une carte du massif du Mont Blanc est proposée par Viollet-le-Duc, au 1/40 000e, suite à des relevés réalisés par l'auteur. Cette publication, très esthétique, n'améliore pas les travaux publiés en 1865 et 1867.
< En 1887, Henry Duhamel publie une carte du massif du Pelvoux au 1/100 000e d'une bonne qualité.
< En 1896, édition de la carte des Suisses Albert Barbey, Xavier Imfeld et Louis Kurz de la chaîne du Mont Blanc, la fameuse BIK au 1/50 000e.
1903 - La Commission de topographie et le Service Géographique des Armées
Au début du XXe siècle, l'état-major des Armées et les montagnards partagent une préoccupation commune concernant les insuffisances, voire les erreurs, en matière de cartographie des Alpes ou des Pyrénées.
Une longue collaboration s'établira, entre le Club Alpin, ses différentes composantes scientifiques, et le Service Géographique des Armées, pour la cartographie des montagnes.
En 1903, à l'initiative du lieutenant-colonel du Génie F. Prudent (alors capitaine), un groupe de travail est réuni. Il rassemble des géodésiens et des alpinistes-topographes, avec entre autres personnalités Joseph et Henri Vallot, Franz Schrader, Paul Helbronner…
À la suggestion d'Henri Vallot, cette entité intègre le Club Alpin Français, sous la dénomination de « Commission de topographie » (1903-1914).
La Commission de topographie du Club Alpin jouera un rôle appréciable notamment pour la formation aux techniques des relevés en terrain difficile, l'amélioration des méthodes et des matériels de topographie en montagne, la toponymie et l'analyse critique des épreuves.
La désignation des lieux de montagne
À ce moment-là, la toponymie alpine, la désignation des lieux de montagne, est dans un état chaotique : « dissémination des renseignements, désaccords fréquents entre les intéressés, difficultés d'interprétation provenant de l'imprécision des auteurs, erreur d'identification ».
Ce qui va conduire Henri Vallot à produire une contribution « Des noms nouveaux en haute montagne » dans la revue « La Montagne » de 1909, en lien direct avec les travaux de la Commission de topographie du Club Alpin, en restant dans un cadre national.
Déjà en 1906 dans les Pyrénées, une Commission de la Fédération des Sociétés Pyrénéennes s'était chargée de définir « pour chaque lieu la dénomination et l'orthographe de nom qu'il convient d'adopter et d'inscrire sur les cartes ».
C'est dans les Alpes que le nécessaire travail de recherche et de partage devait être poursuivi.
La Commission de topographie du Club Alpin, et plus tard les rédacteurs des guides-itinéraires des années 1920 à 1950, en lien avec le service de cartographie des Armées, puis de l'IGN, apporteront de nécessaires stabilisations et cristallisations dans la désignation des noms des lieux de montagne.
Ensuite une fois la cartographie figée, il restera de n'introduire que le minimum de changements compatibles avec la vérité reconnue en tenant compte de l'état de choses créé par l'usage, car « en matière de toponymie, il y a des courants que l'on ne remonte pas ».
Pour les crêtes frontalières, les répertoires proposés par les rédacteurs de guides-itinéraires et par les cartographes des différents pays alpins, ne concorderont pas souvent.
Le travail de coordination transfrontière de 1995 ne pourra que constater l'impossibilité d'avancer sur la toponymie des arêtes mitoyennes, en venant buter sur les différentes frontières entre les pays, sur certaines limites de régions ou même sur certaines délimitations de zones linguistiques, où chacun restera maître chez lui.
L‘œuvre de Paul Helbronner
Il faut souligner l'immense travail de Paul Helbronner (1871-1938) durant vingt-deux campagnes de relevés de 1903 à 1928, aboutissant à une modélisation géodésique de l'ensemble des Alpes françaises et de la Corse.
Une tâche considérable doublée d'une série d'illustrations photographiques exceptionnelles et de panoramas remarquables des Alpes.
Une œuvre que le géodésien, alpiniste, topographe et photographe - membre illustre du Club Alpin - réunira en 12 tomes dans sa « Description géométrique détaillée des Alpes Françaises » (voir le dossier du CFD : Un historique de la FFCAM 1874 à 1914 / L‘œuvre de Paul Helbronner).
1906 - La carte au 1/50 000e
< En 1906, Henri Vallot annonce la sortie de la carte de France au 1/50 000e par le Service Géographique des Armées en monochrome, dite à tord carte d'état-major.
1920 - La carte Vallot au 1/20 000e
En 1920, début de la publication de la carte Vallot au 1/20 000e de la région du Mont Blanc, par Henri et Joseph Vallot.
C'est la première carte du Mont Blanc dressée suivant les méthodes modernes de la topographie, les auteurs établirent eux-mêmes leur propre triangulation et les minutes originales de levé.
1922 - La carte au 1/50 000e en couleur
En 1922, une première feuille de la carte au 1/50 000e en couleur du territoire national est publiée.
Ces cartes de 1906 et 1922 au 1/50 000e, dites à tort d'état-major, seront longtemps utilisées par les excursionnistes.
En 1959, un tiers seulement du territoire est couvert…
1923 - La Commission des travaux scientifiques
En 1921, le Service Géographique des Armées s'adresse au Club Alpin et lui propose de « vérifier la toponymie » des feuilles des hautes régions des Alpes pour la réalisation de la carte de France.
En 1923, le CAF répond positivement avec la création de la Commission des travaux scientifiques. Un travail conséquent sera engagé sur les nomenclatures des feuilles remises par le Service géographique de l'Armée de 1923 à 1929.
Les zones de montagne ont été dressées à l'échelle 1/20 000e par le Service Géographique des Armées, avec la mise à disposition des levés de Paul Helbronner, la collaboration de la Commission des travaux scientifiques du Club Alpin et de membres de certaines Sections voisines des montagnes pour la toponymie (voir le dossier du CFD : Le Comite scientifique du Club Alpin Français).
1940 - L'Institut Géographique National
En 1940, le Service Géographique des Armées est remplacé par l'Institut Géographique National afin d'éviter la mainmise de l'occupant…
L'IGN reprendra peu à peu toute la triangulation de la France, et procédera à la publication des cartes, qui avec le temps et les progrès techniques des relevés, deviendront des références.
Une carte au 1/10 000e du Mont Blanc voit le jour en 1949, elle est présentée comme le chef-œuvre de l'Institut.
En 1981, un décret précise que l'IGN a pour mission d'assurer la production, l'entretien et la diffusion de l'information géographique de référence en France.
Il deviendra l'Institut national de l'information géographique et forestière en 2012 en conservant le sigle IGN.
1946 - Une carte du massif des Écrins
En 1946, les premiers guides-itinéraires du massif des Écrins de l'éditeur Arthaud sont accompagnés d'une carte au 1/50 000e proposée par Lucien Devies et Maurice Laloue.
Les cartes de randonnée
< En 1968, publication de la première carte de randonnée au 1/25 000e couvrant la forêt de Fontainebleau.
< Les randonneurs ont à leur disposition des cartes au 1/50 000e (couleur et monochrome) aux levés des années 1890, révisées dans les années 1920 et 1950. Nous sommes à des années-lumière des cartes de nos collègues suisses qui proposent de merveilleuses et précises éditions…
< Longtemps, c'est la carte des éditions Didier-Richard au 1/50 000e qui guidera les randonneurs dans les massifs alpins et en plaine, sur les fonds de cartes de l'IGN. Ce qui laissait une grande part à l'aventure.
1973 - La nouvelle carte au 1/25 000e
< L'Institut Géographique National a tenu un colloque en mai 1973, ouvert aux usagers dont la FFM et le Club Alpin. Il a présenté sa nouvelle carte au 1/25 000e du massif du Mont Blanc, qui se place parmi les cartes de montagne les plus précises, et pouvant désormais accepter la comparaison avec la perfection des cartes suisses.
< Les cartes à cette échelle vont peu à peu couvrir le territoire national, la nouvelle réduction avait l'avantage de satisfaire les usagers, et d'être commune avec celle des cartes des pays voisins.
< Réalisée par des relevés photogrammétriques, complétés sur le terrain de 1956 à 1979, et régulièrement révisée, la série Top 25 au 1/25 000e de l'IGN atteint aujourd'hui une grande précision…
Elle est la carte du randonneur avec les sentiers balisés ou conseillés reportés.
1995 - Les sommets de plus de 4 000 mètres d'altitude dans les Alpes
Contrairement à la chaîne des Pyrénées qui dès 1906 avait vu adopter « pour chaque lieu la dénomination et l'orthographe de nom qu'il convient d'adopter et d'inscrire sur les cartes », il apparaissait que les répertoires proposés par les rédacteurs de guides-itinéraires et par les cartographes des différents pays alpins ne concordaient pas souvent.
Un premier travail de coordination transfrontière permettra d'avancer un peu (voir le dossier du CFD : Le Comité scientifique du Club Alpin / 1995 - Les sommets de plus de 4 000 mètres d'altitude dans les Alpes).
2000 - Des cartes et guides européens
Les Clubs alpins italien et français avec les Instituts géographiques italien et français ont réalisé une série de vingt cartes et guides frontaliers « Alpes sans frontières » avec un financement européen.
Si les itinéraires situés en haute montagne sont correctement balisés avec l'accès aux refuges, certaines zones de moyenne montagne du versant italien ont des itinéraires entièrement délaissés ou peu entretenus.
Le GPS
Ajoutons que l'orientation à l'aide du GPS est aujourd'hui à la disposition de ceux qui ont besoin de cette assistance.
Des instruments sont proposés avec les randonnées enregistrées, il n'y a qu'à regarder la flèche de l'appareil...
Le Géoportail
Le Géoportail des territoires mis en œuvre par l'IGN est un outil complet qui rassemble toutes les données géo-référencées du territoire national, accessible à tous les publics sur internet.
Les altitudes des montagnes
Il convient de relativiser les précisions annoncées pour les altitudes des montagnes, car chaque pays a ses propres définitions pour situer une altitude zéro de référence.
En France, le point de référence se situe à Marseille et l'altitude zéro correspond au niveau moyen de la mer Méditerranée mesuré par le marégraphe entre 1885 et 1897.
La Suisse a une référence sur un repère rocheux du lac Léman devant Genève, en lien avec le niveau moyen de la méditerranée à Marseille.
En Italie, le marégraphe de Gêne donne une référence proche de la moyenne retenue pour Marseille.
La référence n'est pas la même entre l'Autriche qui situe sa référence à Trieste et l'Allemagne qui prend sa référence au niveau de la mer du Nord, la différence est de plusieurs décimètres.
Pour les montagnes de l'Himalaya, la difficulté est de savoir d'où se situe l'altitude zéro de référence, le niveau moyen des marées de la mer dans le Golfe du Bengale pour l'Inde ou le niveau moyen des marées de la mer Jaune pour la Chine. Il faut aussi tenir compte de la variation de la calotte glaciaire qui occupe les sommets.
Les altitudes proposées des montagnes ne sont donc que des repères conventionnels avec les différences notoires au niveau des crêtes frontières.
CONSULTATION
La plupart des textes concernant l'historique de la montagne et de la FFCAM sont disponibles au Centre fédéral de documentation de la FFCAM, 24, avenue de Laumière, 75019 Paris.
Notamment dans les différentes publications :
- Les Annuaires du CAF, de 1874 à 1903.
- Les Bulletins du CAF, de 1876 à 1903.
- La Montagne, de 1904-1905 à 1954.
- Alpinisme, de 1925 à 1954.
- La Montagne & Alpinisme, depuis 1955.
- Les Annales du GHM, de 1955 à 2001 et Cimes, de 2002 à 2015.
Les livres constituant la bibliothèque de la FFCAM sont tous référencés.
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Vous pouvez consulter en ligne le catalogue du CFD avec un accès aux références pour l'ensemble des articles des périodiques et pour les livres.
Il suffit de saisir un mot caractéristique ou un des mots clés d'un ouvrage recherché, dans l'un des champs appropriés (auteur, titre, sujet, année d'édition) et vous aurez accès aux références.
Accès aux publications
Vous pouvez rechercher en ligne les titres suivants :
- Les Annuaires du CAF, de 1874 à 1903, consultables sur le site de la Bibliothèque nationale : http://gallica.bnf.fr
- Voir aussi : www.archive.org et utiliser le mot clé : club alpin français.
- Les Bulletins du CAF, de 1876 à 1903, consultables sur le site de la Bibliothèque nationale : http://gallica.bnf.fr
- La Montagne, de 1904-1905 à 1954, consultables sur le site de la Bibliothèque Nationale : http://gallica.bnf.fr
- La Montagne & Alpinisme, depuis 1955, consultables sur le site de la Bibliothèque nationale : http://gallica.bnf.fr
- Enfin, Alpinisme, de 1926 à 1954, accessibles sur le site du GHM, avec Les Annales du GHM (1955-2001) et Cimes (2002-2015).